Second volet d’un dyptique autour de L’Odyssée, Le Présent qui déborde entremêle cinéma et théâtre, les deux amours de Christiane Jatahy, dans un prisme documentaire entre passé et présent, fiction et réalité.
Avec sa caméra, la metteuse en scène brésilienne a parcouru des camps de réfugiés du monde, de la Palestine à l’Afrique du Sud, en passant par le Liban et la Grèce pour interroger des hommes et des femmes de théâtre en exil. Ils racontent la guerre et la fuite, l’envie de retour avant que Christiane Jatahy ne télescope leurs histoires avec celle d’Homère. Les voilà qui disent les mots d’Ulysse et de Pénélope, le désir de Circé, les incantations d’Hadès… Se tisse avec la fiction plurimillénaire un propos autour de la notion même d’envahisseur, de communauté, de patrie et de foyer. De zones à défendre comme ces indigènes de la forêt amazonienne où la metteuse en scène rejoue elle-même son histoire familiale : un grand-père disparu suite à un accident d’avion et la résonnance des dérives bolsonariennes concomitantes à la création de la pièce, l’été dernier au Festival d’Avignon. La projection sur grand écran de ces récits se répercutent dans la salle, le théâtre surgissant dans l’impromptu d’interventions de comédiens mélangés au public : intervenant et commentant quand ils ne lancent pas une ronde endiablée à laquelle chacun peut participer.
L’abolition des frontières commence avec celle des arts, le théâtre corrodant le cinéma, la réalité naissant de la fiction dans des allers-retours d’images et de métaphores rendues petit à petit inextricables. En creux de ces histoires intimes, une recherche de terre d’asile pour réinventer la vie malgré le sentiment d’un déracinement profond. Du passé chéri aux espoirs de lendemains qui chantent, l’infiniment personnel raconte le collectif, la tragédie humaine se nouant dans des conflits géopolitiques dé- passant le quidam, comme le héros soumis au bon vouloir des Dieux et du Destin. Reste que l’invitation au partage de ces récits, à la compréhension des trajectoires et de ce qui les anime ne peut que rapprocher les protagonistes et les spectateurs-témoins. Donner à comprendre et mettre en perspectives des histoires vieilles comme notre monde pour rouvrir des élans perdus d’accueil.
Au Maillon (Strasbourg), du 4 au 6 décembre
maillon.eu
À la Comédie de Reims, vendredi 31 janvier et samedi 1er février 2020 dans le cadre du Festival FAR away (du 30 janvier au 9 février 2020) lacomediedereims.fr
Au CDN de Besançon Franche-Comté, du 1er au 3 avril 2020 cdn-besancon.fr