Trop présente, trop grosse, trop tout

Pénélope Bagieu croque les débuts d’Ellen Cohen, chanteuse XXL des Mamas and Papas. « Je serai la grosse la plus célèbre du monde », prophétise la future star dont l’ambition n’a d’égale que son tour de taille. Les prémisses d’une success story, comme jetées sur le papier.

Inutile d’avoir vu et revu Chunking Express de Wong Kar-wai, où California Dreamin’ (énorme tube de 1965) passe en boucle, pour tomber sous le charme charnel des Mamas and Papas et leurs chansons à la beauté évidente.

Munie de son crayon, Pénélope Bagieu, séduite par le destin hors-normes d’une chanteuse atypique, nous conte l’histoire d’une enfant contrariée qui se met à s’empiffrer et à grossir à vue d’œil, d’une jeune femme loin, très loin, des canons imposés par le star system mais qui rêve de paillettes et de spotlights, sachant que la gloire et le glam étaient inscrits en majuscules à l’horizon. Ellen assume ses rondeurs au sein de sa modeste famille d’épiciers et à l’école où elle joue de son physique pachydermique et amuse (ou exaspère) la galerie du haut de ses attitudes de diva.

Elle rêve de quitter Baltimore, de « partir à New York et devenir une star de Broadway », pas d’être la reine des bagels au pastrami. Ellen a un « immense corps encombrant dont elle ne sait quoi faire », mais aussi une vraie présence et une magnifique voix qui magnétise son auditoire. La chanteuse obstinée, fan de lectures beat, se goinfre de cookies, de space cakes et d’acide, mais trouvera sa place, dans un contexte marqué par l’assassinat de JFK et la beatlemania virale.

Les planches de Pénélope Bagieu ont la semblance d’un storyboard en noir et blanc – loin de ses cases girly, vues dans les pages de la presse féminine – décrivant l’ascension (difficile) et les amours (contrariés) de celle qui deviendra Mama Cass. Chaque chapitre est narré par un personnage différent, un témoin : Sharon, la prof de chant, la belle Michelle (l’autre fille des Mamas) ou Lou, producteur qui flaira vite le potentiel de Cass et de The Mamas and The Papas. Le dessin, parfois brouillon (du meilleur effet pour décrire l’ambiance floue d’une soirée sous LSD), comme pris sur le vif, peut laisser imaginer que Pénélope était aux premières loges de l’ascension de Mama Cass, étoile filante extra large décédée une poignée d’années après California Dreamin’.

California Dreamin’, édité par Gallimard

www.bd.gallimard.fr

www.penelope-jolicoeur.com

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