Sur écoute

Une compétition internationale, un focus sur Tony Gatlif ou encore un voyage dans le temps. Le festival belfortain EntreVues invite à voir – et à entendre – le cinéma autrement. Questions à Lili Hinstin, sa directrice.

Cette année, vous invitez Tony Gatlif et proposez une sélection de huit de ses films. En quoi ce cinéaste, explorateur des marges, est proche de “l’esprit” d’EntreVues ?

Nous allons notamment présenter son premier film, qu’il a retrouvé dans sa cave, La Terre au ventre, sur fond d’Algérie. Il n’a pas été montré depuis sa sortie en 1978, où il fut soutenu par Debord. Il y a peu de non bourgeois qui font du cinéma, mais c’est le cas de Gatlif, un vrai combattant politique : il a une manière particulière de filmer la société, les gens dans les bidonvilles ou qui font la manche, les clochards, les exilés…

http://www.youtube.com/watch?v=T05Qx7BZonU

Il s’approche au plus près de la population rom et la musique manouche est très présente dans ses films qui auraient pu être programmés dans le cadre d’Expérience son, sélection thématique se penchant sur le travail sonore dans les comédies musicales comme chez Godard, Tati ou De Palma…

Le son est le parent pauvre du cinéma. Dans les critiques, on parle du mouvement de caméra, mais jamais du mixage qui se situe exactement sur le même plan que l’image. Nous avons mis en place des Laboratoires d’expériences sonores, destinés aux lycéens, pour voir comment la mise en scène est totalement dépendante des sons. Nous verrons la première scène de Stalker de Tarkovski en deux versions, mono originale et remastérisée : la temporalité n’est pas la même !

Sweet Sweetback’s baadasssss song de Melvin Van Peebles a été choisi parce que le cinéaste a lui-même composé la BO ?

C’est son utilisation de la musique et du chant qui m’a intéressée. Une sorte de chœur grec prend en charge l’intériorité du personnage. À un moment, il n’y a plus de dialogue : ne reste plus que la fuite effrénée du protagoniste avec cette musique en boucle, comme une ritournelle, l’expression de sa panique, de sa traque.

Cette année, vous conviez le public à effectuer un Voyage dans le temps. Pourquoi ne pas avoir gardé cette thématique pour la 30e édition, l’an prochain ?

Parce que nous reviendrons sur l’histoire du festival d’une autre manière, en impliquant les cinéastes qui ont marqué EntreVues. Tout part de Brigadoon de Vincente Minnelli et Je t’aime, je t’aime d’Alain Resnais que j’avais très envie de programmer. Cette rétrospective va nous permettre d’interroger le temps, une “question de cinéma”, au travers des œuvres très différentes : La Jetée de Chris Marker, Retour vers le futur de Robert Zemeckis…

http://www.youtube.com/watch?v=yqMEc0oe4yc

Ou Un Jour sans fin d’Harold Ramis. Si vous pouviez imaginer un film sans fin, quel serait-il ?

Je pourrais rester indéfiniment devant n’importe quel Renoir, notamment le très rare La Nuit du carrefour, un Maigret, projeté cette année. Il se trouve que durant le festival, nous allons diffuser tous les épisodes d’Histoire(s) du cinéma de Godard en boucle : le plus beau des voyages infinis dans le temps…

À Belfort, au Cinéma Pathé, du 22 au 30 novembre

03 84 90 40 40

www.festival-entrevues.com

 

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