Sens dessus dessous
Pour son 80e anniversaire, Georg Baselitz est célébré par une double rétrospective bâloise. Quelque 90 peintures et 12 sculptures monumentales ont envahi la Fondation Beyeler, tandis que le Kunstmuseum explore l’œuvre dessiné.
Conférence de presse monstre à la Fondation Beyeler : des centaines de journalistes sont réunis pour écouter
le patriarche Baselitz, tous exaltés par ses toiles immenses et par la présence du maître. Le parcours débute avec celles qui le firent connaître dans les sixties, catharsis pour l’histoire mouvementée et violente du XXe siècle, qui vient rappeler que Hans-Georg Kern – son vrai nom – fit ses premières armes picturales dans les écoles des Beaux-Arts de la RDA du réalisme socialiste. Il passe à la moulinette l’imagerie du Héros (du nom d’une de ses plus célèbres séries) avec des soldats disproportionnés, étrange mélange entre le hiératisme totalitaire et l’expressionnisme d’Otto Dix. Baselitz explose alors les conventions du portrait classique, poursuivant le mouvement dès 1966 avec ses “tableaux fracturés” dans lesquels le motif est éclaté façon puzzle en lignes parallèles ou dans tous les coins de la toile, comme dans un kaléidoscope.
Il continue à briser les conventions, renversant l’image en 1969 pour résoudre « le problème du tableau en tant qu’objet », nous expliquait-il, patient, il y a quelques années et « en représentant les objets sans la signification qu’ils peuvent avoir ». C’est devenu sa marque de fabrique, ici explorée à l’envi, des origines à des pièces de 2017 aux lignes élémentaires. Pensons à Avignon ade où se découvre le corps de l’artiste, comme coupé en deux d’un coup de hache, dont la complexion délicate contraste puissamment avec un fond noir. À coté de cela sont installées d’immenses sculptures de bois, têtes peintes et crevassées, corps mal dégrossis, comme criblés de balles. Quelques minutes de bus et nous voilà au Kunstmuseum Basel où sont montrés une centaines de travaux sur papier permettant au visiteur de plonger dans la processus de création : le trait file, libéré des contraintes de la peinture, permettant de mieux apprécier le travail de Baselitz dans une orgie expressive.
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