République démocratomique
Après Elf, la pompe Afrique, Nicolas Lambert propose le deuxième volet de sa trilogie politique : Avenir radieux, une fission française est une roborative réflexion sur le nucléaire et la démocratie.
Bleu, Blanc, Rouge. Nicolas Lambert a fait un triptyque théâtral des couleurs du drapeau, explorant les « trois mamelles de l’État français ». Après une première pièce sur le pétrole et avant un opus dédié à l’armement, il s’attaque au nucléaire. Deux heures de spectacle permettent de « réfléchir sur la notion de démocratie ». Simplement accompagné d’un musicien sur scène, il incarne de nombreux rôles, déclamant des textes officiels. Ses sources ? Tout d’abord, des comptes-rendus de rencontres avec les citoyens initiées par la Commission nationale du débat public en 2010 sur la construction d’une deuxième centrale nucléaire de type EPR à Penly. Et l’on s’aperçoit que « le débat n’existe pas et que les rares gens qui ont fait le déplacement sont invités à répondre à des questions auxquelles le pouvoir a déjà répondu pour eux ». Une consultation de pure forme, voire une mascarade, donc… sur un sujet essentiel, le nucléaire civil, soumis au « secret défense ». Les autres fondements du spectacle – un entretien avec Pierre Guillaumat, ancien Administrateur du Commissariat à l’Énergie atomique et Ministre, puis une kyrielle de paroles de politiques de toutes époques et de touts bords – donnent le vertige.
En disséquant le discours institutionnel, Nicolas Lambert jette une lumière crue sur les zones d’ombres d’une démocratie française qui a fait le choix du nucléaire après la Deuxième Guerre mondiale sans que cette décision ait jamais été réellement débattue : « Le propos est le même depuis le début. Peu importe les hommes en place, il ne varie pas » et se concentre autour de la grandeur de la France et de son corollaire, l’indépendance énergétique. Parfois, le public rit (jaune). Ainsi, lorsqu’est demandé à Pierre Guillaumat ce qui a changé depuis Tchernobyl, sa réponse laisse pantois : « Il peut y avoir des accidents de bombes, tout autant que des accidents de centrales nucléaires. » Le plus souvent cependant, nous sommes tétanisés devant l’absence de discussion possible face à un sujet qui dépasse les simples contingences économiques. Le silence règne. Et c’est glaçant… En finesse, Nicolas Lambert tente de nous faire sortir de la torpeur, car aujourd’hui rien n’a vraiment changé. Certains Ministres sont écologistes, le Président est “normal”, mais les enjeux demeurent et le secret pèse de tout son poids. Gageons que cet intelligent spectacle permettra d’éveiller quelques consciences.
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