Rendez-vous en terre connue
Le projet photographique France(s), territoire liquide a pour objectif de dessiner le(s) visage(s) d’un pays fuyant, fluide. À découvrir en plusieurs expositions, à Metz et Vandœuvre-lès-Nancy.
Qu’est-ce que la France ? Comment esquisser les contours d’un paysage sans cesse bouleversé par l’urbanisme ? Comment dresser le portrait d’un pays à l’époque de la mondialisation et d’Internet, où les frontières « sont définies par les ondes électromagnétiques plutôt que par les murs » ? Ainsi se questionne Paul Wombell, directeur artistique de l’exposition du collectif We Are French (WAF), 43 photographes réunis fin 2010. Ils ont parcouru la France pour une « mission photographique », gardant à l’esprit la commande de la Datar (Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale) des années 1980 : réunissant 29 jeunes photographes, elle consistait à livrer une image dépoussiérée de la France d’alors.
Trente ans plus tard, WAF donne une vision contemporaine – fragmentée – du pays grâce à un travail de terrain ayant donné lieu à une vaste exposition, au Tripostal de Lille (été 2014) ainsi qu’un bel ouvrage1 de plus de 400 pages. Pour Aline Aumont du Centre culturel André Malraux, à l’origine des trois expositions dans l’Est (rassemblant une quinzaine de photographes en tout), ce projet permet de saisir « comment l’écriture photographique a évolué ». La secrétaire générale du CCAM insiste sur la pluralité de langages dans les réponses apportées par les artistes. Parmi des œuvres « aux antipodes les unes des autres », on fait le grand écart entre les travaux de Thibault Brunet qui, pour questionner le rapport entre réalité et virtualité, a voyagé… via Google Earth, ou ceux, nettement plus burlesques, de Guillaume Martial, Prix HSBC 2015 pour la Photographie. Cet ancien patineur artistique base sa démarche sur l’expression corporelle dans l’espace. « Comment on habite un lieu, se l’approprie, s’y adapte ? », se demande ce Tati de la photo qui interroge la modernité en se mettant lui-même en scène dans du mobilier urbain jugé absurde ou des constructions architecturalement surprenantes. À L’Arsenal, la pluralité de propos est également de mise avec Marion Gambin qui a sillonné les autoroutes françaises, fascinée par leur « douce étrangeté » ou Frédéric Delangle représentant la capitale française dans un contexte mondialisé : il a envoyé ses clichés de la ville en Inde où des artistes ont peint des enseignes publicitaires clinquantes en langue hindi, créant un intrigant Paris-Dehli.
03 87 74 16 16 09 51 63 66 07 À Vandœuvre-lès-Nancy, au Centre culturel André Malraux (à la galerie Robert Doisneau), du 24 mars au 30 avril 03 83 56 15 00 www.francesterritoireliquide.fr France(s), territoire liquide, édité au Seuil (texte de Jean-Christophe Bailly) – www.seuil.com Rencontre avec Frédéric Delangle, un des quatre fondateurs de WAF, vendredi 13 mars (20h30) à la Maison des Associations de Metz – www.photo-forum.fr