Quatre femmes en croix
Marc Lizano adapte librement un livre de Maurice Leblanc : embarquement immédiat pour L’Île aux 30 cercueils. Frissons d’angoisse garantis.
Il n’est jamais évident de s’emparer d’un livre devenu culte pour toute une génération : l’adaptation télévisuelle du roman de Maurice Leblanc L’Île aux 30 cercueils, à la fin des années 1970, avait en effet fait trembler de peur, semaine après semaine, les gamins d’alors. Le charmant visage de Claude Jade, errant, livide et apeurée, sur la lande bretonne battue par les vents est encore présent dans la mémoire des quadras d’aujourd’hui. Lorsqu’on y repense, il est impossible de s’empêcher de frissonner… Marc Lizano s’en souvient lui aussi et affirme vouloir « faire remonter les émotions ressenties pendant [s]on enfance ». Il rajoute une nouvelle – et brillante – strate à la légende de Véronique d’Hergemont et de son diabolique mari, le conte Vorski. L’île de Sarek est le théâtre de ce récit labyrinthique au rythme implacable…
Avec une référence assumée au roman-feuilleton (le découpage de la BD en six parties), l’auteur nous plonge dans une atmosphère lugubre faite de bigoudènes anxiogènes, de récifs menaçants (les trente cercueils sont autant d’écueils) et de sombres calvaires. La terrible prédiction – quatre femmes crucifiées et trente victimes – semble sur le point de se réaliser. Notre héroïne saura-t-elle l’empêcher et sauver son fils ? Entre polar et récit fantastique, Marc Lizano entraine son lecteur dans un tourbillon en noir, gris et rouge (sang)… et son dessin faussement naïf contribue avec force au caractère oppressant de l’ensemble. Voilà que l’on replonge, ravis, au cœur des peurs de notre enfance.