Pulp western
Texas Cowboys marque le retour du duo Bonhomme / Trondheim… dans un univers bien différent de celui d’Omni-visibilis (Dupuis, 2010). En route pour le Wild Wild West !
Tout commence avec l’envoi d’un journaliste de la côté Est, le jeune Harvey Drinkwater (quelle idée de s’appeler ainsi dans l’Ouest sauvage où les buveurs d’eau sont considérés comme des pieds tendres) au Texas pour faire un reportage sur le Hell‘s Half Acre, la zone la plus dangereuse de tout le pays. Voilà un western oscillant entre hommage et parodie, entre Série B et Fumetti à l’italienne (ceux qui ont grandi avec Tex Willer ou Kit Carson ne seront pas dépaysés), une référence clairement assumée puisque le découpage de l’album évoque les numéros successifs d’une revue (neuf au total, comportant chacun quinze planches) avec, pour rythmer la lecture, des couvertures très réussies. Le dessin de Matthieu Bonhomme – également auteur de la saga Esteban – est d’une grande efficacité et rend hommage de manière décalée aux pulp magazines. Nous croisons certaines caricatures de l’Ouest : Ivy Forest (un avatar à peine masqué du dessinateur de Barbarella) le vieux renard des saloons, Betsy Marone, redoutable et sexy joueuse de poker (qui poursuit une vengeance psychotique), le brigand Sam Bass (un personnage qui a vraiment existé et dont la spécialité était le pillage des trains) et une bonne dizaine d’autres. Nous aurions pu en rester là et Texas Cowboys n’être qu’un avatar – certes réussi – des genres populaires auxquels il se réfère. L’habile scénario de Lewis Trondheim permet cependant de passer dans une autre dimension : avec sa construction complexe, toute en flashbacks et en sauts chronologiques, le roman graphique semble se jouer avec brio de toute temporalité. Déroutante au premier abord, cette architecture narrative ressemble à un puzzle dont les pièce s’assemblent peu à peu pour former une image cohérente.