Paul-Émile Fourny revisite Rusalka à Metz

Rusalka : Maquette des décors d’Emmanuelle Favre

Transportant Rusalka dans un univers 1900, où la mer gelée fait face à un casino abandonné, Paul-Émile Fourny renforce le caractère romantique de l’opéra de Dvořák.

La musique d’Antonín Dvořák est envoûtante. Intensément romantique. Tragique, l’histoire est celle d’une sirène éperdument éprise d’un jeune prince, souhaitant devenir humaine pour le séduire. Opérée par la magicienne Ježibaba, sa métamorphose a un terrible prix, puisqu’elle devient muette. Une tragédie que rien ne pourra arrêter est ainsi lancée, puisque la contrepartie à ce pacte diabolique est que Rusalka sera damnée si son amour la trahit. Si tout se passe bien au début, les choses se gâtent avec l’arrivée d’une princesse étrangère. Conte lyrique inspiré de La Petite sirène d’Andersen – mais plongeant également ses racines chez Friedrich de La Motte-Fouqué ou dans des légendes germaniques, comme La Cloche engloutie –, Rusalka se rattache à tout un pan de l’imaginaire européen. Ici présentée dans son intégralité (avec le ballet), l’oeuvre séduit Paul-Émile Fourny, qui y voit « autant l’histoire d’une créature fantastique déchirée par un amour impossible pour un humain, que la confrontation entre deux mondes, le monde marin et le monde terrestre », illustrant l’opposition irréconciliable entre l’univers (dit) civilisé et l’indomptable et vierge nature.

Paul Émile-Fourny : Rusalka
Rusalka

« Si on s’en tient aux didascalies, il est nécessaire de représenter une forêt, un étang… Pour ma part, j’ai souhaité sortir de cet univers vu mille fois. J’ai découvert un jour un bâtiment étonnant, qui m’a immédiatement évoqué La Petite sirène. Sur les bords de la Mer noire en Roumanie, le Casino de Constanţa a été abandonné pendant des années, même s’il est en cours de rénovation. Tout semble figé dans le temps, en 1900, la période où cette pièce a été écrite. Cette époque charnière avec ses multiples inventions merveilleuses, qui comporte déjà en germe toute la barbarie du siècle, est absolument fascinante. L’édifice à demi ruiné est le palais décrépit du Prince, qui fait face à l’univers aquatique où vit Rusalka », explique le directeur de l’Opéra-Théâtre de l’Eurométropole de Metz. L’action se déroule en hiver, par un froid polaire qui a fait geler la mer, renforçant le côté romantique, tendance gothique, de la partition. Cette poésie nimbée de mystère entre en résonance avec celle irriguant une oeuvre dont tous les personnages sont ici caractérisés avec force : ainsi, par exemple, Ježibaba « n’est elle pas une sorcière caricaturale. Elle ressemble, à mon avis, à celle de Mireille de Gounod, une femme qui a vécu des choses terribles, différentes du lot commun. »


À l’Opéra-Théâtre de l’Eurométropole de Metz du 2 au 8 juin
opera.eurometropolemetz.eu

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