Vingt ans que le très zen chanteur allemand Patrice trace son chemin entre reggae, folk, soul et hip-hop. Il revient avec un Super Album en forme de surprenant best of.
Sa discographie est à l’image de son histoire métisse et de son tempérament nomade : un précipité d’échanges transatlantiques, de Cologne à Kingston, en passant par Freetown. Né en Rhénanie-du-Nord-Westphalie d’une mère allemande et d’un père écrivain, réalisateur et opposant politique sierra-léonais (Gaston Bart-Williams), Patrice a découvert tôt le reggae en tombant sur une K7 appartenant à sa soeur ainée, Burnin’… d’un certain Bob Marley. Depuis, le quarantenaire n’a cessé de vadrouiller, posant sa guitare tantôt en Jamaïque, tantôt à New York ou Paris, enregistrant des sons partout, de l’Europe du Sud à l’Afrique de l’Ouest. En vingt ans de carrière, celui qui tire son prénom du héros de l’indépendance congolaise et figure du panafricanisme, Patrice Lumumba – rien que ça ! –, a tout fait pour déjouer les étiquettes que des critiques trop pressés auraient aimé lui accoler. Parce que trop blanc pour l’Afrique et trop noir pour l’Europe, il conçoit sa musique comme une hybridation créole, une sorte de best of entre tous ses mondes, qu’il résume, lui, sous le terme de “sweggae” – un clin d’œil au “swag” des rappeurs, à cette attitude d’orgueil assumé, entre confiance et fierté de ce qu’on est.
Dub, folk, funk, blues, hip-hop, electro… Patrice a grandi en écoutant aussi bien Marley que Dylan, Fela que Billie, Nirvana que Jay-Z. À 18 ans à peine, il fonde avec des amis germanonigérians le big band BANTU (pour “Brotherhood Alliance Navigating Towards Unity”), aujourd’hui basé à Lagos, qui a vu passer dans ses rangs aussi bien Damian Marley qu’Ayo (avec laquelle Patrice a eu deux enfants) et Mariama ! Côté solo, il sort, à 21 ans, son premier album, Ancient Spirit, empreint de percus ragga et de riffs ska, qui lui ouvre les portes du milieu (il assure les premières parties de la tournée de Lauryn Hill). La suite est une combinaison fichtrement séduisante de la nonchalance des riddims et des tempos africains, des cuivres chauds de la soul et de la guitare acoustique, ponctuée de plusieurs tubes, dont l’inoubliable Today, sorti sur l’album Nile en 2005, et la reprise funk de l’hymne à la vie que chantait Nina Simone, Ain’t Got No, I Got Life (2010). Sorti en octobre dernier, le Super Album, enregistré pendant la pandémie avec quelques potes dans sa chambre d’ado – sous les toits de la maison familiale près de Cologne –, réinterprète treize de ses plus grands succès… et livre une nouvelle pépite, Good Vibrations, où le hit ensoleillé des Beach Boys se voit passé au filtre d’un sample du très cru Quiet Storm des Mobb Deep… Chapeau, rien à redire !
À La Laiterie (Strasbourg) mercredi 15 mars, à la BAM (Metz) vendredi 17 mars et à La Cartonnerie (Reims) mardi 21 mars
artefact.org – citemusicale-metz.fr – cartonnerie.fr