Out of the box : le Schaulager fête ses 20 ans

Dieter Roth, Solo Szenen, 1997–1998, photo : Stefan Altenburger Photography Zürich, © Dieter Roth Estate

Pour célébrer son 20e anniversaire, le Schaulager propose Out of the box, rassemblant les œuvres de 25 artistes contemporains majeurs.

Un titre comme un éclairant condensé du programme du Schaulager depuis sa fondation : stocker et montrer les œuvres de la Fondation Emanuel Hoffmann, pour résumer. À la semblance d’un village de boîtes, chacune conçue sur mesure pour une œuvre, dans son volume et son acoustique, Out of the box invite ainsi à découvrir des pièces dont temps et espace forment le substrat. Pensons à Ravel Ravel Interval (2017) d’Anri Sala : dans une salle plongée dans le noir, deux immenses écrans sont installés. Sur chacun, les doigts d’un pianiste en gros plan, interprétant simultanément le célébrissime Concerto pour la main gauche. Le jeu de transparences visuelles épouse les superpositions sonores faites de variations de tempi et d’intensité pour former une bande-son hypnotique, oscillant entre harmonie et dissonance. Autre temps fort du parcours, deux œuvres de David Claerbout laissent une impression durable sur le visiteur : Wildfire (Meditation on fire) est une animation 3D modélisée à partir d’images numériques en 2019-20, montrant une forêt. Espace idyllique, elle est rapidement la proie des flammes avant que ce gigantesque incendie ne laisse place à un paradis sylvestre retrouvé. Voilà qui illustre, dans un silence assourdissant, l’ambivalence du feu, objet de fascination et vecteur de mort, mais questionne aussi le visiteur face au enjeux climatiques. Plus mystérieux, ses Nightscape Lightboxes (2003) sont des échappées belles, aux limites de la photographie, dans des paysages lynchiens où la beauté est celle de l’angoisse et de l’étrangeté. L’obscurité joue avec la lumière des phares qui apparaît progressivement, le temps que la rétine s’habitue au noir, dans des paysages campagnards anxiogènes qui pourraient être autant de scènes de crime.

Out of the Box : Jean-Frédéric Schnyder, HANDLE WITH CARE, 2012, Emanuel Hoffmann-Stiftung, Depositum in der Öffentlichen Kunstsammlung Basel, photo : Tom Bisig, Basel, © Jean-Frédéric Schnyder
Out of the box : Jean-Frédéric Schnyder, HANDLE WITH CARE, 2012, Emanuel Hoffmann-Stiftung, Depositum in der Öffentlichen Kunstsammlung Basel, photo : Tom Bisig, Basel © Jean-Frédéric Schnyder

Au fil des espaces, on croise aussi plusieurs pièces de Klara Lidén, qui interrogent la place du corps dans l’espace, notamment avec le très poétique Closer Now (2022), mais aussi de plasticiens que les habitués du lieu connaissent bien, à l’image de Monika Sosnowska (avec son cube cabossé, métaphore de la destruction créatrice) ou Dieter Roth. Ses Solo Szenen (1997/1998) – 128 téléviseurs avec lecteurs VHS intégrés, diffusant le quotidien de l’artiste – préfiguraient la télé-réalité. On le voit lire, dormir, se doucher… dans un dispositif saturé d’écrans qui évoque un système de surveillance rétro. Enfin, impossible de ne pas mentionner les cités de carton de Jean-Frédéric Schnyder : lotissement angoissant fait de dizaines de maisons clonées, enchevêtrement d’églises ou encore immense gratte-ciel. Sans produire aucun déchet, il utilise 100% des caisses servant à transporter les bananes pour cette gigantesque installation tutoyant l’Arte povera.


Au Schaulager (Münchenstein/ Bâle) jusqu’au 19 novembre
schaulager.org

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