Dans L’Eau douce, Nathalie Pernette se réconcilie avec cet élément imprévisible. De quoi en savourer toutes les nuances, pour mieux en prendre soin.
« De façon générale, je n’apprécie pas l’eau. J’ai toujours peur de la noyade, peur de perdre pied », explique la danseuse et chorégraphe. Paradoxalement, elle a pourtant un côté ludique qui lui plait : « J’aime cette contradiction et le fait de lui trouver plusieurs facettes », continue-t-elle. « Ce liquide peut être à la fois doux et sensuel, enfantin, mais également sombre et se rapporter aux naufrages. » Aujourd’hui, Nathalie Pernette se sent un peu plus en harmonie avec lui. Sur scène, l’artiste bisontine l’incarne dans ses trois états, inspirée entre autres par les films L’Âge de Glace, Titanic mais aussi l’essai du philosophe Gaston Bachelard, L’Eau et les rêves. « C’est varié, mais toutes ces recherches nous ont aidés à mieux la comprendre. Lorsqu’elle est à l’état liquide, cela nourrit l’idée que notre corps peut fondre. Nous avons donc inventé le ‘‘floutch’’, une danse nous permettant de mieux l’interpréter. » Des mouvements courbes, fluides et parfois insaisissables, prenant le contre-pied de gestes plus brusques et saccadés quand vient le moment d’incarner la glace. Formée en arts plastiques, la fondatrice de la compagnie Pernette déploie ici son style, marqué par le rapport à la matière. Tantôt accompagnée de fragiles volutes de fumée symbolisant l’aspect gazeux, c’est bien la condition solide qu’elle a préféré personnifier. L’occasion « d’inventer une danse miniature, où chaque articulation compte. Il y a presque des petits accents de hip-hop. C’est ma partie favorite, contrairement aux deux autres danseuses. »
Bien que L’Eau douce soit un solo, Nathalie Pernette laisse en effet sa place à Léa Darrault et Anita Mauro au fil de la tournée. « Nous jouons à tour de rôle, car la danse appartient à tout le monde. Le but est de créer une transmission, d’enrichir le spectacle et notre partition. » Le personnage qu’elles se partagent, sorte de Pierrot blafard et lunaire, « apparait comme froid et solitaire, ce qui colle parfaitement avec l’eau gelée. » La scénographie mise également sur des couleurs épurées rappelant la banquise ou les lagons turquoise. L’atmosphère feutrée, renforcée par une faible luminosité qui fait ressortir les tons bleutés et froids, compte aussi sur l’ajout de peintures fluorescentes. « Un moyen, par la scénographie, de donner vie aux bêtes des profondeurs, aux créatures des abysses, mais sans utiliser de projection lumineuse. Nous avons peint le tapis, qui ne révèle ses teintes qu’une fois les lumières éteintes. » L’accompagnement musical fait quant à lui la part belle aux violons, aux voix de sirènes et d’enfants, mais aussi à différents rugissements et à des bruits de carlingue ou de grincements. « J’adore que la musique évoque une forme d’inquiétude », sourit la chorégraphe. « Nous nous amusons avec la peur, tout en la dosant pour faire voyager les enfants et le public. »
Au Centre Culturel Claude Vigée de Bischwiller samedi 4 mars (dès 3 ans), à Pôle Sud (Strasbourg) mercredi 8 mars, à la Maison des Arts (Lingolsheim) dimanche 12 mars et à l’Art’Rhena (Vogelgrun) mercredi 10 mai
mac-bischwiller.fr – pole-sud.fr – mdarts-lingo.com – artrhena.eu