Maire, François Rebsamen est candidat à sa propre succession.
Quel bilan pour la culture ces six dernières années ?
Emmanuel Bichot (Agir). La mandature aura été marquée par l’aboutissement de la rénovation du musée des Beaux-Arts à laquelle notre groupe municipal était favorable. Toutefois, passé l’effet de curiosité qu’aura suscité cette rénovation, il n’est pas certain que cela permette d’augmenter durablement la fréquentation.
Dans le domaine musical, l’extension de la Vapeur (scène de musique actuelle) est un point positif pour la création et la promotion de nouveaux artistes. En revanche, la programmation de l’Opéra de Dijon suscite de nombreuses critiques et n’emporte pas l’adhésion en dépit d’un coût très élevé pour la ville (6,7 millions d’euros). Nous nous inquiétons également des difficultés rencontrées par l’Orchestre Dijon Bourgogne et le Conservatoire Jean-Philippe Rameau qui n’ont pas bénéficié d’un soutien suffisant de la municipalité alors qu’ils devraient constituer une des priorités de la politique culturelle dijonnaise.
De façon générale, l’enseignement et la pratique artistique dans tous les domaines ne sont pas assez soutenus et valorisés. Enfin, il manque à notre avis une grande manifestation d’envergure internationale telle que le festival international baroque de Beaune ou les Francofolies de La Rochelle.
Sylvain Comparot (LREM, UDI). Le Bilan est riche, Il est indéniable que beaucoup de choses ont été faites ces 10 dernières années, rappelons que la rénovation du MBA remonte à 9 ans. Quelques festivals sont apparus comme VYV Solidarités ou Sirk, d’autres ont disparu comme l’Oeno-Festival, les autres ont été confortés, nous nous inscrivons dans cette dynamique. Un regret, la sous-utilisation de très beaux outils à notre disposition, l’Auditorium et le Grand Théâtre. Sans doute avec une programmation plus variée pourrait-on en tirer un meilleur parti.
Stéphanie Modde (EELV). Nous faisons le constat d’une politique culturelle tournée vers le rayonnement de Dijon (part du budget consacré à l’Opéra, réaménagement du Musée des Beaux-arts,…). Cela est positif mais l’arbitrage budgétaire devrait permettre également d’aider des projets culturels novateurs portés par les associations, artistes ou citoyens.
François Rebsamen (PS, Modem). Dijon consacre 25 % de son budget à la culture, nous soutenons la création, les établissements et les acteurs associatifs, nous investissons dans la restauration du patrimoine. Nos musées et nos bibliothèques sont gratuits et nous portons des actions de médiations auprès de tous les publics. Après plus de 10 ans de travaux et un budget de 60 millions d’euros dont 1.5 millions consacrés à la restauration des œuvres, nous avons ouvert le 17 mai 2019 un musée des beaux-arts totalement rénové. C’était l’un des projets phare du mandat qui vient de s’écouler. Aujourd’hui après 9 mois d’ouverture nous y avons accueillis plus de 300 000 visiteurs.
Le musée de la vie bourguignonne a également fait l’objet d’aménagement tant dans les salles qu’en extérieur pour valoriser son patrimoine remarquable.
Les façades patrimoniales de la rue principale de Dijon font l’objet d’une vaste campagne de réhabilitation et nous soutenons financièrement les propriétaires privés qui font cet effort conséquent.
La nouvelle piétonisation du quartier des arts autours du musée des beaux-arts permet aujourd’hui une réelle valorisation de l’architecture, de même que la requalification de tous les alentours du musée de la vie bourguignonne avec la création d’un jardin public ouvert sur la ville.
Dans une volonté d’accessibilité et de nouveaux services publics offerts aux Dijonnais.ses, nous avons développé l’offre numérique des bibliothèques et nous ouvrons désormais, celles de centre-ville adulte et jeunesse chaque 1er dimanche du mois.
D’autres bibliothèques du réseau dans des quartiers populaires sont ouvertes 4 dimanche par an. Des bibliothèques de rue ont été implantées dans tous les quartiers de la ville.
Nous avons réhabilité d’anciennes halles militaires pour y créer des ateliers mis à disposition gracieusement d’artistes émergents et de la cie de rue les 26 000 couverts.
La salle de musique actuelle La Vapeur a été totalement rénovée et agrandie.
Nous nous sommes engagés dans une implantation d’œuvres d’art contemporain dans l’espace public.
L’art urbain contemporain s’est installé sous forme de murs peints pérennes dans tous les quartiers de la ville.
Grâce à l’initiative d’un collectif d’artistes et avec notre soutien financier et technique, un M.U.R (modulable, urbain, réactif) s’est installé au cœur du centre-ville, véritable galerie à ciel ouvert, des artistes nationaux et internationaux sont invités tous les 3 mois à y installer leur travail. Ce collectif a créé un festival d’art urbain Banana Pschit !
Le centre de développement chorégraphique nationale, Le Dancing, a été installé dans un ancien théâtre municipale dans le quartier populaire des Grésilles.
Un nouveau festival musical et solidaire « Vyv les solidarités » a vu le jour sur une initiative privée d’un groupe mutualiste.
L’opéra de Dijon a obtenu la reconnaissance « théâtre lyrique d’intérêt national ».
Le pôle jeune public « la Minoterie » a obtenu la reconnaissance « scène conventionnée – art, enfance et jeunesse ».
Quels axes de politique culturelle souhaitez-vous mener en cas de victoire ?
Emmanuel Bichot. Premièrement, nous voulons renforcer le lien entre culture et patrimoine en valorisant davantage les atouts historiques et patrimoniaux de notre ville.
Deuxièmement, nous voulons soutenir l’enseignement et de la pratique artistique pour le plus grand nombre en consacrant plus de moyens en particulier pour le conservatoire.
Troisièmement, nous reverrons la programmation culturelle des salles de spectacles (Auditorium, Grand théâtre, etc.) pour qu’elle réponde aux attentes de tous. Nous souhaitons aussi réfléchir à l’accueil d’une manifestation culturelle de notoriété internationale – festival musical – peut-être en lien avec les Climats de Bourgogne. Il s’agit de créer un événement qui attire des touristes du monde entier et améliore la visibilité culturelle internationale de Dijon.
Sylvain Comparot. Nous souhaitons comme annoncé plus haut travailler sur une meilleure utilisation des lieux existants avec une programmation plus variée et plus dense.
– Nous n’avons pas prévu d’investir dans de nouveaux équipements, Dijon étant bien doté même si une salle de mille place trouverait peut-être sa place.
-Nous voulons en revanche travailler sur l’accès à la Culture. Avoir un beau Musée c’est bien, qu’il soit gratuit pour tout public pourquoi pas, mais on sait que ce n’est pas ça qui favorisera l’accès à la Culture de tout un public aujourd’hui hors de cette démarche. Notre souhait est donc de travailler vraiment sur la démocratisation de la Culture grâce à une offre culturelle accessible et en lien avec les associations de créer un véritable parcours de sensibilisation et d’éducation à la culture pour les plus jeunes, les habitants de quartiers, les personnes âgées isolées et les personnes en situation de handicap.
– Avec la rénovation du Parc des Expositions, nous souhaitons attirer plus de grands évènements culturels que la jauge des salles dijonnaises actuelles ne permet pas.
– Dijon serait parfaitement légitime à soutenir des foires et festivals de qualité comme une biennale d’Art Contemporain.
– Il manque également un festival de musique actuelle grand public-jauge moyenne qui soit entre MV-GeneriQ (très pointus) et VYV-Concert de Rentrée (très gros).
Stéphanie Modde. D’abord, nous souhaitons que les arbitrages financiers et le choix du soutien à tel ou tel projet se fasse de manière plus concertée , comme toutes les politiques municipales. Nous associerons donc des personnes qualifiées, représentant le monde de la culture, aux commissions en charge de la vie culturelle.
Par ailleurs, il nous semble important de mener une analyse plus fine sur l’impact social des financements publics en direction de la culture. Cela nous permettra, le cas échéant, de réallouer certains financements vers des projets qui méritent un soutien public. Cela peut être le cas de la médiation culturelle, de l’urbanisme transitoire, d’un tiers-lieu culturel,
Etc Enfin, une des nos priorités sera à la fois d’accompagner l’Opéra ,à trouver de nouveaux co-financeurs publics. Aujourd’hui la ville consacre plus de 6 millions d’euros par an au soutien de l’Opéra. Il faut, dans les années à venir, faire baisser cette somme, sans déstabiliser l’Opéra.
François Rebsamen. Nous souhaitons que l’art et la culture soient présents dans tous les quartiers et pour tous les publics.
Nous encouragerons toujours la création et la vie culturelle sous toutes leurs formes.
Nous allons faire vivre d’avantage le grand théâtre, lieu emblématique au cœur de ville.
Dans ce même quartier des arts, nous avons l’ambition de faire de la bibliothèque de centre-ville adulte « la Nef » un lieu d’échanges et de partages, une véritable agora citoyenne.
Nous créerons un nouveau lieu de vie culturelle dans une ancienne chapelle au cœur de ville qui sera rénovée à l’occasion des 800 ans de Notre-Dame.
Nous allons bien-sûr poursuivre la rénovation de notre patrimoine.
Nous allons organiser un festival de la culture scientifique pour rendre hommage à Gustave Eiffel né à Dijon.
L’art contemporain urbain aura toute sa place dans la ville (festival, murs peints, etc.).
Quel serait alors le projet emblématique de la mandature à venir ?
Emmanuel Bichot. Notre projet culturel phare est de valoriser le patrimoine historique inestimable que représente le Palais des ducs et des États de Bourgogne en l’ouvrant intégralement aux visiteurs. À ce jour, seule la partie relevant du Musée des Beaux-Arts est accessible. En effet, une grande partie du Palais des ducs et des États n’est accessible que partiellement et difficilement au grand public : les Salons, le Bureau du Maire, la salle de Flore, la salle des États, la Tour Philippe Le Bon, la Chapelle des élus, les archives municipales, les celliers, les cuisines ducales, etc. En ouvrant ces salles à la visite, nous souhaitons ainsi offrir la possibilité à tous les visiteurs de découvrir en totalité un haut-lieu d’histoire et de patrimoine à dimension régionale et européenne, afin de mieux comprendre l’histoire du Palais, mais aussi l’histoire de Dijon et de la Bourgogne. Cela permettra également de resituer dans son contexte historique la partie la plus ancienne du Musée des Beaux-Arts. Ce projet s’accompagnera de l’instauration d’une entrée payante pour le Palais des ducs et le Musée des Beaux-Arts pour les visiteurs extérieurs à la région Bourgogne-Franche-Comté.
Sylvain Comparot. Nous travaillons sur un grand projet de Festival populaire pour faire connaitre l’histoire et la Gastronomie Dijonnaise. il sera monté et produit par les habitants. IL a vocation a faire connaitre la richesse de notre histoire et de notre patrimoine.
Stéphanie Modde. Nous créerons un festival de « jardins éphémères » pour relier nature et culture. Ce festival favorisera le lien social et le travail collectif avec les habitants, le service des espaces verts, l’Ecole Nationale Supérieure d’arts et de design de Dijon, des paysagistes, des écoles d’horticulture, de paysagistes … Ce festival sera aussi l’occasion de mettre l’art contemporain dans la rue, plutôt qu’agrandir le Consortium qui peine déjà à attirer le grand public. Nous mettrons en valeur aussi bien des initiatives citoyennes, du design urbain, du street-art que des grands noms de l’art contemporain.
François Rebsamen. La création d’un grand musée d’art contemporain avec l’extension du Consortium. Nous ambitionnons de voir Dijon devenir la capitale française de l’art contemporain. Nous poursuivrons l’implantation d’œuvres d’art dans l’espace public, créant de nouveaux parcours dans la ville.
Comment voyez-vous la place de la Cité internationale de la Gastronomie et du Vin (ouverture prévue fin 2021) dans le dispositif culturel dijonnais ?
Emmanuel Bichot. Malheureusement le projet de Cité internationale de la gastronomie et du vin n’a pas été traité comme un projet culturel mais comme une vaste opération immobilière. Aujourd’hui, c’est un projet fourre-tout dénué de cohérence, sur lequel la ville a perdu tout contrôle.
L’enjeu est de revenir aux sources du projet. De quoi s’agit-il ? Il s’agit de valoriser l’inscription par l’UNESCO en 2010 du repas gastronomique des Français au patrimoine culturel immatériel de l’Humanité. Dijon s’étant vu confier la thématique du vin, il conviendrait de se concentrer sur la place du vin dans la gastronomie française en valorisant notre savoir-faire régional et en travaillant, pour ne citer qu’un exemple, sur l’alliance mets-vins.
S’agissant du site, il conviendrait de mieux en restituer l’origine en mettant en avant les hospices de Dijon. Enfin, ce projet ne doit pas être enfermé dans ce seul site ; il doit mobiliser toute la ville autour d’un projet de « gastronomie dans la Cité», incluant en particulier les magnifiques Halles de Dijon que nous souhaitons redynamiser et les fonds culinaires de la Bibliothèque municipale de Dijon (ancien collège des Godrans).
Sylvain Comparot. La Cité Internationale de la Gastronomie et du Vin était au départ une belle idée et un beau projet. On a beaucoup de réserves sur le dossier :
– le montage par une société privée par vraiment spécialisée dans le domaine culturel (EIFFAGE) même si elle s’est entourée de prestataires reconnus.
– la conduite du projet et les changements intervenus (galerie commerciale, projet immobilier..) on est loin du format originel proposé.
– la cohérence avec notamment des cinémas, en fait un multiplex commercial, qui n’ont qu’un lointain rapport avec la Cité de la Gastronomie et du Vin. Notre volonté sur ce dossier est de l’améliorer en le sortant du cadre restreint dans lequel il est pour faire de DIJON la Cité de la Gastronomie et redonner de la cohérence au projet pour faire un vrai projet culturel et touristique.
Stéphanie Modde. Ce projet est emblématique d’une volonté de rayonner à l’international, il faut penser également à l’ancrage régional, à un approvisionnement local et bio, et à mettre en valeur la diversité de la culture culinaire. Il est important que les dijonnais s’approprient le lieu , y viennent régulièrement pour découvrir de nouvelles sensations culinaires, visiter des expositions. Et surtout nous souhaitons que le lieu soit à portée de tous les budgets. La Cité borde l’Ouche et le Port du Canal qui sont deux espaces que nous avons prévus de valoriser dans le cadre de notre mandat 2020-2026. Nous prévoyons par exemple un grand évènement autour des cuisines du Monde au Port du Canal. Il est important que la Cité de la Gastronomie soit ouverte sur son quartier, nous y contribuerons.
François Rebsamen. Il s’agit d’un équipement exceptionnel qui renforcera l’attractivité culturelle, touristique et également économique et commerciale de Dijon Métropole Il va venir compléter l’offre déjà existante et s’adressera tant aux habitants qu’aux touristes.
Le cœur culturel de la cité, avec ses espaces d’expositions permanentes et temporaires (1750m²), offrira des parcours sensoriels et interactifs autour de la cuisine française, du repas gastronomique des Français – classé au patrimoine mondiale de l’UNESCO – et bien sûr des accords mets-vins.
Le Centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine (CIAP) de notre ville labélisée « ville d’art et d’histoire » en 2009, y prendra place. Il donnera à comprendre la ville, son architecture et son histoire à travers des expositions, des ateliers. Des actions de médiations, d’éducation artistique et culturelle s’y dérouleront notamment à destination du jeune public. Ce sera un lieu vivant invitant à parcourir Dijon.
Ce vaste ensemble dans un espace boisé classé de 3000 m2, portera des restaurants, des hôtels, un espace commercial, un complexe cinématographique composé de 13 salles dont 4 dédiées au cinéma d’art et d’essai, une école de cuisine et de pâtisserie Ferrandi.
Un parcours patrimonial mettra en valeur les édifices de l’ancien hôpital général et son histoire. C’est aussi un éco-quartier de 540 logements qui s’installera sur ce site remarquable.
En attendant d’ouvrir ses portes en 2021, une maison du projet s’est installée dans la chapelle de l’ancien hôpital général pour présenter le projet aux Dijonnais.es, plus de 7000 personnes s’y sont déjà rendues.
La Cité dijonnaise constitue un pôle moteur en matière de valorisation et de promotion de la vigne et du vin, en liaison étroite avec l’Institut de la vigne Jules Guyot et la chaire Unesco « Culture et traditions du vin » de l’université de Bourgogne.
Cette mission trouve un écho supplémentaire avec l’inscription, en 2015, des Climats du vignoble de Bourgogne sur la prestigieuse liste de l’Unesco.