Mœurs en série
Le premier opus de La Mondaine, diptyque signé Jordi Lafebre et Zidrou qui se déroule dans le Paris des années 1930, est une des réussites de ce début 2014.
Leur première collaboration parue en album fut une “nouvelle en BD” insérée dans un opus collectif, La Vieille dame qui n’avait jamais joué au tennis et autres nouvelles qui font du bien. Ils ont ensuite publié Lydie avant d’initier ce diptyque dédié à la brigade des mœurs. La coopération entre Jordi Lafebre et Zidrou y fait mouche, une fois encore. Les dessins du premier – qui évoquent parfois curieusement le meilleur de Daniel Hulet – rendent avec maestria l’ambiance interlope dans laquelle évolue la Mondaine dans le Paris de 1937 : marlous de bas étages, putes au grand cœur et flics plus ou moins (enfin, plutôt moins…) honnêtes dansent une gigue infernale. Et l’on croise un inspecteur principal amoureux de la petite reine, un curé défroqué devenu cinglé qui mime Belzébuth couvert du sang d’un chat qu’il vient d’éventrer, une prostituée plutôt charmante et quelques autres personnages pittoresques. Pour sa part, Zidrou pose les jalons d’un récit qui s’annonce passionnant puisqu’il débute sous les bombardements anglo-américains dans un abri du Paris occupé pour se prolonger par un flash back centré sur le jeune inspecteur Aimé Clouzeau – plutôt puceau que ripou – dont l’histoire familiale semble complexe. Le scénariste happe le lecteur avec un sens du dialogue et de la formule se situant dans une zone improbable entre Simenon et Les Tontons flingueurs : « Pas de vices… Pas de police » ou « Ça sent le fond de bidet. On est à “La Mondaine”, pas chez Chanel ». On ne saurait dire mieux.