Directrice musicale de l’Opéra national de Lorraine depuis le début de la saison, Marta Gardolińska se dévoile à travers deux programmes symphoniques. Portrait.
Nous sommes début décembre, le lendemain de la première de Carmen à l’Opéra national du Rhin dirigée avec élégance et précision par Marta Gardolińska. Détendue, la cheffe polonaise trentenaire narre son enfance à Varsovie : « Dès que j’entendais de la musique, j’essayais de danser… avant de marcher », s’amuse-t-elle. Si le parcours – débutant par le piano à six ans, puis la flûte – est classique, la rencontre avec une cheffe de choeur a été déterminante, lui donnant « [s]a première leçon de direction à seize ans. Tout a été immédiatement naturel, plus qu’avec les instruments. » Puis un camarade lui assène qu’un cursus de chef est trop difficile pour une femme : « J’en avais déjà très envie, mais cette remarque a été un véritable déclic. Découvrir la Symphonie fantastique de Berlioz et ses mondes colorés m’a confortée. » Ses modèles ? « Nikolaus Harnoncourt dans le répertoire baroque et classique, des chefs comme Hans Knappertsbusch et Bruno Walter pour les oeuvres germaniques. » Suivront des années d’études à Vienne et une courte période en tant que membre du Dudamel Fellowship Program à Los Angeles. Elle a choisi de postuler à Nancy « parce que l’Orchestre offre une double expérience symphonique et lyrique », avec pour credo de « permettre à un groupe important d’artistes de faire de la musique ensemble afin de percevoir une symphonie comme une oeuvre de musique de chambre. Mon rôle est de faciliter l’écoute, la communication, de donner une importance égale à chacun. »
Deux concerts sont l’occasion d’apprécier son art consommé de la programmation avec une exploration des Splendeurs polonaises (12 & 13/05) : « Chopin, dont sera donné le Premier concerto pour piano, est en quelque sorte, l’arbre qui cache la forêt », affirme Marta Gardolińska. Elle nous convie à découvrir ses compatriotes Antoni Szałowski « dont le néoclassicisme évoque celui de Prokofiev » et Witold Lutosławski avec son Concerto pour orchestre, page des années 1950 se plaçant dans le sillage de Bartók. Il se nourrit des musiques populaires de Mazovie – région du centre de la Pologne – pour créer un folklore imaginaire aux puissantes séductions, comme Stravinski dans Le Sacre du printemps. Changement d’atmosphère dans une seconde soirée intitulée La Force du destin (02 & 03/06) où l’ouverture de l’opéra éponyme de Verdi croise le Concerto pour violon de Sibelius. Écrit sous l’effet d’une force supérieure selon l’aveu du compositeur, il mêle mélancolie romantique nordique et étincelles lumineuses, réminiscences éclatantes d’un voyage en Italie. La soirée s’achève avec la Symphonie n°4 de Tchaïkovski, nimbée d’un douloureux fatum, son auteur évoquant « cette force fatale qui empêche l’aboutissement de l’élan vers le bonheur, qui veille jalousement à ce que le bien-être et la paix ne soient jamais parfaits ni sans nuages. »
À la Salle Poirel (Nancy) jeudi 12 et vendredi 13 mai, puis jeudi 2 et vendredi 3 juin
opera-national-lorraine.fr