Avec De Mena, Murillo, Zurbarán, le MNHA met à l’honneur peinture et sculpture à l’ère du baroque espagnol.
En Espagne, le XVIIe fait figure de “Siècle d’Or” : irrigués par les influences italiennes de la Contre-Réforme, de nombreux artistes imaginent un style baroque placé au service de l’Église. Si l’époque voit émerger des peintres de renom, tels Murillo ou Zurbarán, l’exposition se penche aussi sur la sculpture, “petit frère” sous-estimé d’une période où les deux arts cohabitent et s’enrichissent pourtant mutuellement. Ainsi, huit sculptures hyperréalistes de Pedro de Mena sont-elles exposées aux côtés du mysticisme de Zurbarán et de son clair-obscur (dans la lignée du Caravage) : Ecce Homo et Mater Dolorosa, par exemple, suscitent la compassion et la fascination grâce au souci du détail, que l’on retrouve dans les traits, le bois et les matériaux. La précision de l’artiste lui permet de dresser des portraits complexes. Éléments essentiels de la dévotion catholique, les résidus de sang du Christ – que l’on découvre jusque dans sa barbe – et les larmes de sa mère, apportent un réalisme macabre poussant à la contemplation.
L’exposition entre littéralement dans les entrailles des œuvres du sculpteur avec une série de clichés radiographiques nés d’une coopération inédite avec le service d’imagerie médicale du Centre Hospitalier du Nord d’Ettelbrück. Cette initiative permet de mettre à jour les techniques d’assemblage et l’aspect matériel. Contribuant à démystifier leur aura, ce sont les différentes pièces d’un puzzle complexe qui se révèlent. Tête, bras et mains emboîtés ou yeux d’un côté. Clous, tiges et chevilles, de l’autre. Ainsi, la figure de Saint François d’Assise révèle-t-elle ses artifices. Les images montrent le sens du détail jusque dans les tissus portés qui prennent des allures rêches et effilochées. Pedro de Mena creuse dans le quadrillage des mailles le bois pour donner son effet tridimensionnel et vivant au vêtement. Les impacts visibles sur les photographies témoignent d’un travail extrêmement minutieux. Pour attirer l’attention sur la complexité des sculptures baroques, une salle d’introduction didactique accueille les spectateurs. Le service de restauration du MNHA a réalisé des vidéos qui reproduisent les secrets de fabrication, donnant son aspect hyperréaliste aux œuvres. Colle de peau de lapin, apprêt et pigment bleu de smalt pour son manteau, la parure de la Mater Dolorosa appelle doublement à la contemplation : celle de la compassion et celle de la technicité.
Au Musée national d’Histoire et d’Art (Luxembourg), jusqu’au 21 novembre
mnha.lu