Loïc Lefebvre et ses prouesses gustatives à L’Atelier du peintre

1. Loïc Lefebvre © Benoît Linder pour/für Poly 2. © Lucas Muller

La palette de Loïc Lefebvre se déploie en fines nuances gustatives éminemment françaises, à L’Atelier du peintre de Colmar.

Depuis la “table du chef”, la vue sur la cuisine est imprenable. Niche accueillant quatre convives, elle permet d’apprécier au plus près le ballet de Loïc Lefebvre et de sa brigade, illustrant le credo d’un cuisinier installé en ces murs depuis mars 2009 (et récompensé d’une Étoile au Guide Michelin dès 2011) : « Précision, rigueur et organisation. » Au regard des assiettes du natif de la Meuse, ce ne sont pas de vains mots. Et de résumer, lapidaire, sa cuisine française d’aujourd’hui, bâtie sur de solides fondations classiques, et servie dans un cadre épuré illuminé par le sourire de Caroline Cordier : « Quand je conçois un plat, je vais chercher un ingrédient ou deux qui lui confèrent son caractère contemporain. Mais le plus important est que chacun comprenne ce qu’il mange : la lisibilité est essentielle », résume-t-il. Lorsqu’on lui demande ses peintres préférés, il cite « Jean Siméon Chardin avec son Panier de fraises – il vous donne une envie irrépressible de déguster les fruits, c’est incroyable – et Tamara de Lempicka dont j’aime la droiture. Mes dressages évoquent l’esprit du jardin à la française », sourit-il.

Loïc Lefebvre
Loïc Lefebvre : L’Atelier du peintre © Dorian Rollin

Preuve en est apportée avec un plat savamment architecturé, composition abstraite d’une rigueur exemplaire, esthétique mais pas esthétisante, où un jeu géométrique de formes agencées avec souplesse excite l’œil, avant que les goûts n’explosent dans un maelström expressionniste. Un huitième de sphère de chou fleur caramélisé au four, en croûte d’amande – et voilà le placide légume transfiguré –, est le comparse du jour d’un perdreau de chasse à patte rouge rôti avec une infinie délicatesse. C’est néanmoins la crème de muscade et un fougueux condiment citron / genièvre qui donnent un puissant coup de fouet à l’ensemble, conférant à ce plat tout son sel et le rendant inoubliable. Voilà qui illustre avec force le modus operandi d’un chef formé dans le Sud – avec les jumeaux Pourcel à Montpellier et chez Jacques Chibois à Grasse –, qui se sert bien souvent de l’acidité des agrumes pour aiguillonner les sens : « Je n’aime pas les plats plats », s’amuse Loïc Lefebvre. Un autre avatar de cette assertion est donné par une entrée iodée à souhait, où un granité de pamplemousse parachève un tourbillon de saveurs dans lequel une glace aux huîtres, une poignée de moules et autres coques, ainsi qu’une crème aux algues enlacent tendrement des Saint-Jacques dans un jerk marin des plus aboutis. Quelques minutes durant, nous voilà emportés sur les bords de l’Atlantique. Merci pour le voyage, maestro !

© Lucas Muller

L’Atelier du peintre est situé 1 rue Schongauer (Colmar). Ouvert du mardi soir au samedi. Menus de 49 à 125€.

atelier-peintre.fr

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