Letton est donné

Photo de Stéphane Louis pour Poly

Compositeur en résidence auprès de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, Pēteris Vasks (né en 1946) écrit une musique mystique, irriguée par la nature et les traditions de son pays, la Lettonie.

Grandir en Union soviétique avec un père pasteur était « très difficile », affirme dans un étonnant euphémisme, Pēteris Vasks. Écouter les musiques contemporaines autorisées – venues du bloc de l’Est ou, plus rarement, d’Occident comme celles d’Olivier Messiaen – constituait une porte de sortie dans un « univers fermé. Au cours des années 1960, j’ai découvert, émerveillé, les partitions de compositeurs comme Witold Lutosławski ou Krzysztof Penderecki », se souvient-il. Ses œuvres de jeunesse sont influencées par les expérimentations aléatoires du premier, auteur de Jeux vénitiens. « La place du hasard dans le concert était une révolution. Cela permettait une grande liberté dans un système verrouillé. Politiquement, c’était un beau pied de nez aux autorités », explique un homme profondément croyant, également marqué par le mysticisme d’Henryk Górecki. Aujourd’hui encore, ses pièces en sont pétries, même s’il n’aime guère les qualifier de « religieuses. Je pense que le terme de verticalité décrit bien nombre de mes pages ». Dieu en haut. Les hommes en bas. Les notes comme lien et Bach flottant par-dessus, telle une ombre tutélaire.

https://www.youtube.com/watch?v=C1K8ug5ft3o

Souvent comparé à son homologue estonien Arvo Pärt, Pēteris Vasks partage avec lui une profonde quête d’harmonie et un mysticisme tantôt contemplatif, tantôt violent qui emporte l’auditeur dans une puissante tempête d’émotion brute. Évocation souvent grandiose de la nature, cette « Cathédrale de la Création », et réminiscences des musiques folkloriques lettones entraînent le public dans la noblesse méditative des étendues baltes. On demeure fascinés par un corpus artistique tonal « rejetant tout intellectualisme » dont le but est d’atteindre chacun en plein cœur. Illustration avec Dona nobis pacem, une « prière en trois mots pour notre monde devenu fou, une vague sonore d’une puissante intensité » présentée à Strasbourg dans le cadre d’un Concert de l’Armistice où elle voisine avec le Concerto pour piano n°20 de Mozart et deux pages de Strauss, Métamorphoses et Mort et transfiguration pour une réflexion autour de la Première Guerre mondiale.

Au Palais de la Musique et des Congrès (Strasbourg), jeudi 10 et vendredi 11 novembre

www.philharmonique-strasbourg.eu

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