Les tatas flingueuses
Créé au Théâtre du Peuple de Bussang, Le Gros, la vache et le mainate déboule avec fracas sur la scène de La Coupole. Totalement barré et politiquement incorrect, ce spectacle de Pierre Guillois ne ressemble à aucun autre. Jubilatoire en diable !
Comment raconter un spectacle dont le créateur nous prie à genoux de ne rien révéler ? Car ce qui se passe sur scène avec ces fous furieux est en effet très loin du synopsis… pourtant déjà bien inquiétant. Jugez plutôt : on nous annonce, à la mise en scène, le sémillant Bernard Menez. Oh ! Oh ! Oh ! Jolie poupée, nous répondrez-vous d’un ton goguenard. Ce qui révélerait indubitablement votre méconnaissance de l’animal. Car dans le genre déjanté, en voilà un qui détient la palme. En s’acoquinant avec lui, Pierre Guillois, l’ancien directeur du Théâtre du Peuple – et accessoirement le coupable de ce grand n’importe quoi – réalise le casting le plus improbablement parfait qui soit. Et avec ces deux-là lâchés en roues libres, on peut s’attendre à tout, en particulier au meilleur qui n’est rien d’autre que le pire. Ou vice-versa. Le résultat donne une “opérette barge” totalement hilarante et complètement givrée.
Sans rien trahir des surprises que réserve ce spectacle, on peut néanmoins dévoiler qu’il y est question d’un gros (plus exactement d’un homme en cloque), d’une vache (on ménage le suspense) et d’un mainate (qui écoute Francis Lopez en boucle ; n’oublions pas que nous sommes dans une opérette). Mais aussi de deux tatas très folles, incarnées au-delà de toute imagination par Jean-Paul Muel et Pierre Vial, sociétaire honoraire de la Comédie Française « pour la malheureuse raison que nous n’avons pas trouvé d’actrices assez peu délicates pour incarner ces harpies », précise le metteur en scène. Et puisque nous évoquions ce jeune homme sur le point d’accoucher, vous attendez sans doute des nouvelles du bébé. Il se porte bien : 110 kg, une Kalachnikov en guise de hochet et une barboteuse sur mesure pour l’acteur Olivier Martin-Salvan, spécialiste du bruitage et des grimaces qui ne démérite pas dans ce rôle ingrat du “bébé qui dégoûte”. Au milieu de cette famille de frapadingues, la Beauté vient régulièrement frapper à la porte, sous les traits, tour à tour, d’un postier, d’un ambulancier ou d’un pompier au corps d’éphèbe qui se livre à des strip-teases chauds bouillants dont les tatas salaces ont du mal à se remettre. Quant au metteur en scène, il ne sait plus très bien ce qu’il fait là, et on le comprend un peu. Entre burlesque, humour noir et suprême mauvais goût, ses hurluberlus partent en vrille en repoussant à l’extrême les limites du rire. Et encore, vous ne savez pas tout…
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