Le vrai et le faust

Photo de Grégory Massat 

Après le succès des Troyens1, John Nelson retrouve l’Orchestre philharmonique de Strasbourg pour une nouvelle page de Berlioz, La Damnation de Faust. Le chef américain parle du compositeur français.

Comment décrire votre relation avec l’OPS qui se déploie désormais depuis de longues années 2 ?
Lorsque j’ai dirigé l’Orchestre philharmonique de Strasbourg pour la première fois, je suis tombé amoureux des musiciens. Ils ont à la fois une fougue française et une discipline allemande ainsi qu’une attitude très positive. C’est une joie absolue de travailler avec eux.

Avec Les Troyens (2017), vous avez initié un “cycle Berlioz” : qu’est-ce qui vous attire dans la musique d’un compositeur dont vous êtes un spécialiste renommé ?
Étrangement, j’ai commencé mon cursus de direction d’orchestre à la Juilliard School de New York avec un professeur français, Jean Morel mais pas une fois nous n’avons étudié Berlioz ! Je l’ai découvert sur la suggestion de Matthew Epstein qui m’a pressé d’écouter un enregistrement des Troyens de Colin Davis. Cela m’a époustouflé ! J’aime tout dans sa musique : son originalité, sa véracité, le drame et l’orchestration à couper le souffle. Il sonne toujours très moderne, même aujourd’hui.

Cette proximité avec le compositeur ne risque-t-elle pas d’engendrer une routine ?
Certainement pas ! J’ai dirigé huit productions des Troyens, cinq de son Requiem et ses autres œuvres à de nombreuses reprises : à chaque fois j’ai l’impression de le faire pour la première fois. Sa musique est tellement fraîche et originale !

Vous adorez diriger d’immenses fresques chorales : qu’est-ce qui vous attire dans ce répertoire ?

Comme je suis né dans une famille religieuse, les œuvres de ce type comme les passions de Bach, les oratorios de Haendel et Haydn et les messes de Beethoven et Bruckner ont toujours exercé une puissante attraction sur moi. Je réétudie actuellement le Requiem de Berlioz et ce qui m’impressionne est une combinaison d’une brillante architecture globale et de minuscules détails dans l’articulation. Aucun compositeur avant lui n’était arrivé à cela.

Cette année, vous dirigez La Damnation de Faust à Strasbourg, où vous retrouvez Joyce DiDonato et Michael Spyres, deux des plus grands chanteurs de la planète : comment résumer cette œuvre en quelques mots ?
C’est la pièce la plus dramatique de Berlioz, parce qu’elle traite du paradis et de l’enfer, de l’innocence et de la dépravation totale. La musique qui en résulte est sans doute la plus dif cile à diriger parmi toutes celles que le compositeur écrivit.


Au Palais de la Musique et des Congrès (Strasbourg), jeudi 25 et vendredi 26 avril

philharmonique.strasbourg.eu

1 Voir Poly n°197 ou sur poly.fr ; le CD de cette production a été récompensé par la Victoire de la musique classique du meilleur enregistrement en 2019
2 Il a régulièrement dirigé avec Le Messie de Haendel (décembre 2009), des programmes Elgar / Walton (mai 2012) et Schnittke / Haydn / Pärt / Mozart (mars 2013) ou encore le War Requiem de Britten (novembre 2013)

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