Lacan, l’exposition fait entrer en résonance la psychanalyse avec peintures, sculptures, installations… dans un parcours passionnant.
Au Centre Pompidou-Metz, le visiteur pénètre dans un labyrinthe où son intelligence et ses sens sont sans cesse stimulés au fil d’une exposition en trois dimensions. Elle rassemble « des œuvres que Lacan a regardées, mais aussi les œuvres d’artistes qui sont des hommages directs à sa pensée. Et puis enfin, montre des œuvres qui, selon nous, regardent Lacan, c’est-à-dire qui entrent en connivence profonde avec sa pensée », résume Bernard Marcadé, un de ses deux commissaires. Parmi les premières, est évidemment accroché L’Origine du monde (1866), acquis par le psychanalyste en 1955, et le panneau peint par André Masson pour cacher / dévoiler l’iconique huile de Gustave Courbet. Autour d’elle, quelques pièces dialoguant avec cette icône sont signées Betty Tompkins (Fuck Painting #57, 2017), Agnès Thurnauer (dans Origine World #3, elle sature la célèbre toile de noms de peintres féminisés, en 2014 : Francine Picabia, Eugénie Delacroix, etc.) ou encore Deborah de Robertis. Sa photographie intitulée Miroir de l’Origine (2014) rappelle une performance éponyme où elle avait écarté les cuisses dans la salle où la peinture est accrochée au Musée d’Orsay, causant un scandale picrocholin dans le monde de l’art.
Dans une des cellules, le Portrait de l’infante Marguerite Thérèse (1654) de Vélasquez rappelle que Lacan commenta longuement Les Ménines dans son Séminaire XIII, toile qui déjoue les codes de la perspective, tandis qu’une autre accueille une réflexion sur « l’objet a », apport essentiel à la théorie analytique désignant pour simplifier « l’objet cause du désir ». Aux deux objets freudiens – sein et fèces –, il ajoute voix et regard, envisageant d’autres possibles comme le phallus… Se croisent alors Princesse X (1915-16) de Brancusi, plâtre organique évoquant une verge turgescente, et Spaghetti Man (1993), sculpture de Paul McCarthy montrant un homme à tête de lapin pourvu d’un sexe flaccide de plusieurs mètres, une créature de contes de fées qui aurait tourné au cauchemar. Impossible ici de rendre compte de la richesse d’une exposition monstre qui convoque avant tout notre regard (sur le monde, sur l’art, sur la société, sur nous-mêmes…), à l’image du Faux Miroir (1928) de Magritte qui pourrait en être l’étendard, tout comme El Consultorio del Psicoanalista (2005) de Leandro Erlich. En reproduisant un cabinet de psychanalyste à l’échelle 1, il propose à chacun – qui regarde la pièce derrière une vitre, dans une boite noire –, par un jeu de miroir sans tain et de lumières, d’être, tour à tour, le thérapeute, le patient, voire… un simple visiteur.
Au Centre Pompidou-Metz jusqu’au 27 mai