La Vierge d’Ensenada
Après l’excellent Les Enfants disparaissent, les Strasbourgeois de La Dernière Goutte publient un second roman du regretté argentin Gabriel Báñez. Sur les rives du río de la Plata se tient Ensenada, infesté de malfrats et de maquereaux dans lequel arrivent nombre d’immigrés errants et d’âmes damnées. Sara Divas, jeune juive de Belgique, débarque dans cette Babel argentine, fuyant avec un père paumé la montée du nazisme. Prise sous son aile par un homme de foi, Bernardo Benzano, elle abandonnera sa langue au profit de l’espagnol, aura des visions de la Vierge et réalisera quelques miracles, jusqu’à fasciner son protecteur.
D’une plume enlevée, Gabriel Báñez entrelace une histoire aux contours gentillets (la Sara désœuvrée devient une Sarita spirituellement éclairée, démesurément aimée par un Benzano exilé à son tour) avec la grande Histoire (la figure d’Eva, à la fois prostituée et Vierge, devenant Evita dans les espoirs de la Révolution) sans qu’on puisse démêler le songe de la réalité, succession d’abandons au profit d’une pureté de l’âme et des sentiments.