La culture du navet
Cinérama est un fascinant ouvrage signé Charles Berberian : il y livre Une sélection des plus mauvais films du monde. Quand le neuvième art rend hommage au septième, ça dépote.
Ces derniers temps, les auteurs de bande dessinée proposent leur vision du cinéma : après Blutch et son errance intello inspirée sur les chemins de la nostalgie, c’est au tour de Charles Berberian – sans son complice de toujours Philippe Dupuy – de plonger le lecteur au cœur de ses passions de cinéphile venues en droite ligne de son enfance. Il nous décrit l’essence de quelques films, réécrivant avec jubilation les dialogues… Et c’est parti pour un tour d’horizon de la Série Z qui débute avec une pépite du cinéma turc du début des années 1980, Dünyayı Kurtaran Adam (l’homme qui sauva le monde), un film de science-fiction kitschoïde, une sorte de Guerre des étoiles à la sauce anatolienne, épopée foutraque et invraisemblable dans laquelle un androïde méchant explose la tête des enfants.
Le reste est à l’avenant : en huit chapitres autobiographiques, le lecteur est brinquebalé entre le cinéma irakien à l’eau de rose des sixties, le pathétique et drolatique Paroles et Musique (1984 ; avec Catherine Deneuve, Christophe Lambert et Richard Anconina) d’Élie Chouraqui emblématique des années Mitterrand ou encore Ultraman super héros nippon qui lutte contre un monstre sismique menaçant une centrale nucléaire… alsacienne. On allait oublier l’objet des premiers émois de l’auteur, la sublime, la merveilleuse, la mythique Edwige Fenech… On la découvre, dénudée, dans un film de 1972 signé Giuliano Carnimeo, Perché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer ? Berberian nous fait partager sa fascination pour cette reine du giallo aux seins rebondis et au regard de braise… L’ensemble est drôle, pénétrant et jubilatoire : welcome to nanarland !