I’m the boy
L’auteur lorrain installé à Strasbourg Frédéric Pontarolo adapte librement L’Homme invisible d’H.G. Wells en bande dessinée, redessinant les contours d’un mythe.
«Lire et relire, synthétiser, identifier les scènes clefs, extraire la substance d’un texte qui finit par vous habiter totalement. L’exercice m’a plu », résume Frédéric Pontarolo, évoquant une première expérience avec la transposition en BD du roman de Flo Jallier, Les Déchaînés (parue chez Sarbacane, en 2017). « Il ne s’agit pas de faire un copier / coller du livre, mais de se l’approprier totalement », poursuit-il. Et pour cette nouvelle expérience prévue en deux volumes, l’auteur s’est attaqué à un gros morceau : L’Homme invisible. Il ne s’est pas calé sur le texte, mais a préservé l’esprit du chef-d’oeuvre d’Herbert George Wells : « J’ai par exemple, rajouté une enfance au personnage », histoire de combler des zones d’ombre et tenter d’expliquer sa destinée. L’album débute ainsi en 1866 par la naissance de Jack, gamin albinos, rejeté par ses cruels camarades qui le traitent de monstre : « Regardez ça, c’est plus moche qu’un nègre », balance un jeune crétin.
Dans le roman, « c’est un homme devenu fou, mégalomane et criminel ». Le dessinateur tente d’expliquer ce délire : « Pour moi, il est victime des préjugés et finit par céder à l’idée que les autres se font de lui. » Se déploie alors, en creux, « une fable sur la médiocrité, une critique de ceux qui sont incapables d’accepter un autre qu’ils chargent de tous les maux. » Dans la BD, notre homme – plus malheureux que méchant – est même soupçonné d’être Jack l’Éventreur ! On craque pour le trait de cet album. Les cases, par exemple, où Jack devient progressivement invisible sont saisissantes : ses yeux sont exorbités et rougeoyants, le réseau de ses veines apparaît comme chez un écorché, sa bouche se déforme dans un infâme rictus. L’atmosphère du Londres de l’ère victorienne est rendue dans un mélange de crasse sordide et d’élégance dressant les contours d’une atmosphère aux teintes de rouille idoine pour ce récit.
Paru aux éditions du Long Bec (17€)
On the road
On pourra retrouver Frédéric Pontarolo au 34e Festival Bédéciné (17 & 18/11, Espace 110 d’Illzach) dont le président est Jérôme Lereculey. Il sera aux côtés de Meynet, Hermann, Achdé, Gine, etc. Plus de 15 000 visiteurs sont attendus pour dédicaces, rencontres, spectacles, expositions dans une atmosphère extrêmement agréable. L’auteur de L’Homme invisible sera aussi au 29e Festival du livre de Colmar (24 & 25/11, Parc des Expositions) dont le thème est “Raconter l’Histoire”. Parmi les plus de 400 auteurs d’un plateau éclectique, mentionnons Catel, Boualem Sansal ou encore Marie Desplechin.