OPS & Michael Spyres : Grave aigu !

Photo de Grégory Massat

Il y a quelques mois, l’Orchestre philharmonique de Strasbourg enregistrait Baritenor en compagnie de l’incroyable Michael Spyres. Un concert essentiel marque symboliquement la sortie du disque.

 

Les richesses de la voix de Michael Spyres semblent sans limites : ceux qui ont suivi le cycle Berlioz de l’OPS le savent bien, appréciant son timbre et sa virtuosité lorsqu’il incarne l’Énée des Troyens ou se joue des difficultés du rôle-titre de La Damnation de Faust. Impossible donc de manquer ce magistral concert permettant de découvrir l’élégance et l’étendue de la tessiture d’un véritable baryténor. Mais que recouvre ce terme à la semblance d’un oxymore ? Pour Michael Spyres, il remonte aux origines de l’opéra, précisant qu’à l’ère baroque, ces chanteurs « rivalisaient de virtuosité et de prouesses techniques avec les fameux castrats, arrivant même à les surpasser. » Au XIXe siècle, ils « occupaient un territoire bien à eux en termes d’ambitus, d’agilité vocale et de théâtralité, les rôles de Rossini exigeant qu’ils maîtrisent une tessiture de plus de trois octaves. Cette voix malléable évolua pour s’adapter au goût du public, mais à cause de l’inlassable acharnement visant à étoffer l’orchestration, ce profil intermédiaire s’est scindé en catégories vocales distinctes. » Alors, ténor au timbre extrêmement sombre, ou baryton aux aigus clairs et faciles ? Les deux mon général !

Preuve en sera apportée avec ce programme dont les contours épousent ceux du disque enregistré dans cette même Salle Érasme du Palais de la Musique et des Congrès en 2020. Sous la baguette de l’ancien directeur musical de la phalange strasbourgeoise, Marko Letonja, se déploie un florilège d’airs montrant les incroyables potentialités vocales de Michael Spyres dans un répertoire écrit pour un ténor passé baryton ou vice-versa. S’y retrouvent les classiques pyrotechniques du genre, que ce soit les aigus presque délirants de Mes amis écoutez l’histoire (montant jusqu’au contre-ré) dans Le Postillon de Longjumeau d’Adolphe Adam ou l’invraisemblable Ah ! Mes amis, extrait de La Fille du régiment de Donizetti, qui compte pas moins de neuf contre-uts ! À côté de ce véritable rodéo vocal seront à découvrir de multiples airs – qui sont souvent des tubes – comme Fuor del mar (Idomeneo, re di Creta de Mozart) ou Aux bords lointains du Lohengrin de Wagner dans sa version française. S’épanouissent aussi d’absolues raretés à l’image d’Ô Dieux ! écoutez ma prière qui se trouve dansAriodant d’Étienne Nicolas Méhul. On craque également pour le génial Glück, das mir verblieb (Die tote Stadt de Korngold) ou Dies nox et omnia, extrait des Carmina Burana de Carl Orff qui « révèle la vraie nature de la voix de baryténor, ainsi que sa beauté en distillant un obbligato éthéré pour ce témoin d’une époque vocale révolue », résume Michael Spyres.


Au Palais de la Musique et des Congrès (Strasbourg), vendredi 5 novembre
philharmonique.strasbourg.eu 

Édité par Warner classics / Erato
warnerclassics.com 

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