Filles de tristesse

Voilà un one shot étonnant se déroulant dans le milieu de la prostitution : entre polar (très) noir et histoire d’amour, Le Client séduit.

Lorsque vous pensez à une maison close, vous imaginez de suite de lourdes tentures pourpres et des colonnes corinthiennes stuquées, comme dans le très beau film de Bertrand Bonello. Oubliez de suite… Les claques contemporains ne ressemblent en rien à L’Apollonide, même si, in fine, l’atmosphère qui y règne est tout aussi sinistre. C’est dans ces bordels du XXIe siècle, tristes immeubles de béton brut plantés à quelques encablures de la frontière française, en Espagne, que nous entraîne Zidrou (de son vrai nom Benoît Drousie, il est connu pour avoir créé L’Élève Ducobu) dont le scénario emballe. Un type binoclard et chétif tombe amoureux d’une prostituée équatorienne. C’est classique. Elle est transférée dans un autre établissement après une tentative de fuite. Tout aussi classique. Ce qui l’est moins c’est la réaction du client in love : il va kidnapper la fille du propriétaire du club pour le forcer à lui rendre sa bien-aimée, l’entrainant dans un surprenant road movie. Se frotter à la pègre va-t-il permettre de rendre le bonheur à notre héros ? Sa quête, en tout cas, est décrite avec talent par le dessinateur espagnol Manolo Carot – alias Man – dans des teintes où le noir se mêle avec finesse aux roses et aux bleus lugubres et assourdis de bordels sans charme, simples maisons d’abattage et de désespérance où les filles n’espèrent plus grand-chose… Si elle demeure un brin naïve, cette BD n’en a pas moins la semblance d’un éclat lumineux de romantisme dans un monde glauque et gluant.

Le Client est paru chez Dargaud (14,99 €)
www.dargaud.com

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