Filantes étoiles

Photo de Groupe Rictus

David Bobee VS William Shakespeare, Round 2. À la morgue humide de son Hamlet de 2010 répondent la chaleur et la sensualité du décor de Roméo et Juliette, nouvelle création pleine de fulgurants échos à l’actualité.

Le leader de la compagnie Rictus, étoile montante de la scène hexagonale s’est, comme pour sa précédente pièce, tourné vers Pascal Collin pour établir une nouvelle traduction du drame shakespearien et ainsi retrouver « l’impact » de sa langue. « Roméo et Juliette est une sorte de creuset bouillonnant de paroles et de corps, chauffés à blanc, où la guerre n’est pas seulement celle entre les Capulet et les Montaigu, mais entre le discours normé de l’arbitraire et la révolution poétique des sentiments », analyse le traducteur. « À travers le langage des amants, jusque dans son maniérisme, le désir fou de l’individu ne peut désormais se formuler sans le respect indiscutable dû au désir de l’autre. » Au sein d’une scénographie toute métallique et cuivrée, sorte de temple illuminé de torches, la troupe d’acrobates-danseurs-comédiens se tient « entre le drame élisabéthain, le conte oriental et la tragédie contemporaine ». Ils nous emportent dans l’âpreté de l’archaïsme vandettal bafoué par la sublimation de l’être aimé, où la loi des pères est renvoyée à la barbarie.

Photo de Groupe Rictus

Entre les braises des sentiments et le feu du carnage, David Bobee offre un brasier de corps échaudés dans une chorégraphie moderne célébrant la force du texte de Shakespeare et ses liens avec le monde d’aujourd’hui : les mariages forcés, la violence de la haine entre bandes rivales dans les quartiers difficiles sur fond de crise des banlieues. « En cinq jours seulement, les Capulet et les Montaigu vont s’entretuer », confie le metteur en scène. « Et, à travers Roméo et Juliette qu’au début tout devrait opposer, ils vont se rencontrer, s’aimer, se déclarer, se marier, faire l’amour, se faire expulser, feindre (ou non) le suicide, “ressusciter”, se resuicider… Cette pièce a l’incroyable chronologie d’une course à bout de souffle pour rattraper le temps. » Avec sa poésie visuelle des corps en mouvements consumés par les passions et l’influence cinématographique de son travail, Bobee sert un écrin à la volonté du dramaturge, décrite par Pascal Collin, « de voir s’affronter, dans le clos d’une société de superbe architecture et d’idéologie sclérosée, le fanatisme de la mort et la liberté du désir ». Vous avez dit d’actualité ?

À Mulhouse, à La Filature, du 19 au 21 décembre
03 89 36 28 28 – www.lafilature.org

À Belfort, au Granit, jeudi 31 janvier et vendredi 1er février
03 84 58 67 67 – www.legranit.org

À Forbach, au Carreau, mardi 26 et mercredi 27 mars
03 87 84 64 34 – www.carreau-forbach.com
www.rictus-davidbobee.net

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