Le strasbourgeois Éric Bentz, leader d’Electric Electric et membre du projet musical quadricéphale La Colonie de Vacances, est l’auteur de la BO abstraite et tribale du film Ni le ciel ni la terre de Clément Cogitore. Rencontre.
Le réalisateur et plasticien alsacien Clément Cogitore a découvert la musique sauvage d’Electric Electric par hasard, sur un disque dur traînant chez Seppia, société qui a produit son documentaire Bielutine, en 2010. « J’ai vraiment accroché et contacté Éric pour qu’il en écrive la musique. Entre nous, c’est une histoire de fidélité. » Ils ont retravaillé ensemble sur d’autres projets jusqu’à Ni le ciel ni la terre, long-métrage sorti l’an passé. Le pragmatique capitaine incarné par Jérémie Renier et les hommes de sa troupe surveillent, en 2014, un secteur situé en Afghanistan, mais une énigmatique disparition de soldats trouble les esprits les plus rationnels. Documentaire ou film de guerre, travail plastique ou œuvre fantastique, réflexion métaphysique ou fable œcuménique, Ni le ciel ni la terre se situe à la croisée des genres. La BO illustre les doutes, les tourments envahissant les protagonistes.
Avant de visionner la moindre image, Éric a écouté « les envies de Clément, ses mots, ses fantasmes », puis a composé, à l’aide de matériel lo-fi, des thèmes ambiant afin d’accompagner les moments hantés par le mystère. Percussions, synthé, guitare et pédales d’effets : pour les scènes d’action, il enregistre des « musiques de tension, percussives, avec des sons étranges », proches de la transe. Le générique de fin part d’un titre violent d’Electric Electric, emmené vers davantage de lyrisme, selon les désirs de Clément Cogitore qui en a « drivé l’écriture à la note près. Au départ, je pensais avoir carte blanche, mais j’ai vite senti que l’étau se resserrait et que je devenais un outil. Il fallait répondre à ses demandes, très précises, et je respecte ça. C’est une chance que d’être pris dans l’univers de création d’un film », affirme Éric… pas certain pour autant de réitérer cette expérience chronophage l’ayant contraint à mettre en stand by ses autres projets. Parmi ceux-ci, il y a La Colonie de Vacances, une idée folle lancée il y a six ans, « en fin de soirée », par Rubin Steiner2 alors programmateur du Temps Machine à Tours.
Ce supergroupe de onze membres réunit Electric Electric, Marvin (Montpellier), Pneu (Tours) et Papier Tigre (Nantes), formations qui se sont beaucoup croisées lors de tournées et partagent une esthétique math-rock / noise. Dans cette jolie colonie de vacances, les batailles de décibels sont de mise, à grands coups de riffs de guitare et de batteries matraquées. Le public, au centre de quatre scènes, s’en prend plein les tympans. Grâce à un dispositif quadriphonique permettant de spacialiser le son et d’« une architecture explosant les codes du concert », les performances de La Colo’ sont autant de promesses de lives jubilatoires et de transes collectives.
La Colonie de Vacances
À L’Autre Canal (Nancy), jeudi 24 mars
www.lautrecanalnancy.fr
Au Moloco (Audincourt), vendredi 25 mars
www.lemoloco.com