Eau sommet
Eau & Art : la Fondation François Schneider expose ses Talents contemporains, sept plasticiens venus du monde entier pour autant de promenades aquatiques extatiques.
Récompensant chaque année des artistes travaillant sur le thème de l’eau, le jury du concours Talents contemporains (présidé par Jean-Noël Jeanneney) a livré son verdict. Les sept lauréats – sur 42 finalistes – sont aujourd’hui exposés avec un tropisme pour la vidéo. On découvre ainsi Seascapes [according to MAYA2009] de la néerlandaise Akmar, installation faite de quatre vidéos passant en boucle, générées par un logiciel montrant des mers artificielles dans différents états (calmes, agitées, tempétueuses…) : sur des flots en noir et blanc, apparaissent des formes géométriques élémentaires, cercles, triangles ou rectangles. Elles sont une invitation à comparer le processus de la pensée humaine et le travail d’un ordinateur. Vidéo encore avec les oniriques et inquiétantes Montagnes noires de Julie Chaffort où des moutons dérivent sur un radeau dans une atmosphère lynchienne brouillardeuse et inquiétante et Focus on infinity de Mathilde Lavenne, un « voyage qui commence à bord d’un bateau, une traversée à la fois physique et symbolique » dans le Grand Nord. Vidéo toujours avec Climats de Rebecca Digne : cinq minutes énigmatiques témoignant d’une réflexion polyphonique montrant que « l’eau reste un élément sur lequel l’Homme n’a pas de prise ».
Le visiteur appréciera également Deluge in a paper cup, sculpture d’Alex Seton interrogeant nos sociétés en faisant référence à la méthode de collecte de l’eau utilisée par les migrants, et la série réalisée à la chambre par Zhang Kechun intitulée The Yellow River. Le photographe chinois a arpenté les rives du Huang He pendant plus d’un an, montrant les ravages de la course à l’abîme où son pays est engagé – pollution, érosion, deshumanisation – mais laissant planer l’espoir dans des clichés d’une grande douceur. Enfin, chacun demeure fasciné par les Chutes libres de Benoît Pype, minuscule installation composée de sept sculptures hautes de deux centimètres qui lui furent inspirées par les formes ébouriffées, pleines d’irrégularités piquantes et d’angles aigus, prises par des gouttes de métal en fusion tombées dans l’eau. L’artiste français fait ici référence à un rituel divinatoire ancestral des cultures germaniques venu de l’Antiquité grecque, le Bleigießen, pratiqué le soir du Nouvel An. L’œuvre invite à se métamorphoser en devin pour interpréter les formes offertes au regard, nous questionnant sur notre rapport intime à la destinée et au hasard.