Du Nord au Sud

Portrait de Kirill Karabits par Sasha Gusov

Deux chefs charismatiques, Jesús López Cobos et Kirill Karabits, ont imaginé deux programmes passionnants pour l’Orchestre philharmonique de Strasbourg. Le premier nous entraine dans la chaleur cubaine, tandis que le second met le cap au nord.

Dans la froidure de décembre, Jesús López Cobos a décidé de nous plonger dans l’univers méconnu, sous nos latitudes, de Silvestre Revueltas, compositeur mexicain du début du vingtième siècle. Avec Sensemayá, page inspirée d’un poème du cubain Nicolás Guillén, il « évoque un rituel magique s’achevant par la mort d’un serpent. Cette pièce – notamment employée dans la bande originale de Sin City – utilise nombre de rythmes populaires mexicains et laisse une grande place aux percussions jusqu’à, parfois, faire penser à Stravinsky », explique le chef espagnol. Après ces crépitements caribéens, il nous propose deux pages françaises tout aussi chaleureuses et lumineuses : la Fantaisie pour piano et orchestre de Debussy et la Symphonie en ré mineur de Franck qui ressemble à une brillante réflexion introspective sur l’homme.

Changement complet d’atmosphère avec un deuxième concert dirigé par Kirill Karabits, un habitué des scènes strasbourgeoises. Il a en effet souvent été au pupitre de l’OPS et entretient une relation privilégiée avec la phalange. Le chef ukrainien a choisi de nous entrainer dans les solitudes glacées du nord de l’Europe. L’image de Sibelius est celle d’un compositeur qui, à la fracture du XIXe et du XXe siècle, s’est transformé en barde de sa terre natale, la Finlande, exprimant le lien puissant et indissoluble l’unissant à sa patrie : Karelia (1893) est une belle illustration de cette relation charnelle, puisque l’œuvre exalte le berceau de la nation finlandaise. Réduire le musicien à son image de porte-parole des aspirations nationalistes bouillonnantes de tout un peuple serait cependant une profonde erreur puisqu’il fut, selon le musicologue britannique Cecil Gray, le « plus grand symphoniste depuis Beethoven ». Preuve en est apportée avec cette Symphonie n°4. Entre les deux partitions du compositeur finlandais, sera joué le Concerto pour piano et orchestre d’Edvard Grieg interprété par le virtuose macédonien Simon Trpčeski : s’y croisent lyrisme et tendresse, accents schumanniens (il est écrit en la mineur comme l’unique Concerto pour piano du compositeur allemand) et influences folkloriques norvégiennes. Voilà sans doute la pièce maîtresse de cette odyssée musicale nordique.

À Strasbourg, au Palais de la musique et des congrès, jeudi 15 et vendredi 16 décembre (programme Revueltas / Debussy / Franck) ainsi que jeudi 12 janvier et vendredi 13 janvier 2012 (programme Sibelius / Grieg)

03 69 06 37 06 – www.philharmonique.strasbourg.eu

http://www.youtube.com/watch?v=IZO2VkKKR7o

Sensemayá de Silvestre Revueltas par l’Orquesta Sinfónica de la Juventud Venezolana Simón Bolívar sous la direction de Gustavo Dudamel

 


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