Découverte de L’Œuvre Messagier, à Saint-Louis

Jean Messagier, Le Gel de Mandrake, 1977-1978, Collection particulière Privatsammlung © Studio François Vézien

L’Œuvre Messagier fête les 25 ans de la disparition de l’artiste franc-comtois, plongeant le visiteur avec émerveillement dans Une Mimêsis abstraite du monde.

L’année 2024 fut riche pour la Fondation Fernet-Branca : le musée a en effet célébré ses vingt ans d’existence, réouvert ses portes après plus d’un an de travaux et lancé sa 57e exposition, en hommage au peintre, dessinateur et sculpteur Jean Messagier (1920-1999). L’artiste, habitué de la Franche-Comté – il a vécu au Moulin de Lougres, curiosité architecturale dont le rôle a beaucoup influencé ses œuvres –, mélange art moderne et abstrait, sans jamais cloisonner les genres. Dans un parcours débutant par la fin de sa carrière, nous voilà conviés à remonter le fil de sa vie à travers quelque 120 travaux, des années 1990 à ses premiers pas, en 1944, alors peu éloignés du cubisme. « Nous commençons à l’envers, avec ses acryliques sur toile, afin de les confronter aux Color Field paintings américains », explique Elie Messagier, son petit-fils. Une première salle nous propulse dans un environnement aux nuances bleues, vertes et violettes, au milieu de coups de pinceaux pouvant s’étirer sur des tableaux de presque trois mètres de long. Exposée pour la première fois au grand public, Le Sang de l’été (1993-94) ouvre la marche, ses larges traînées de teintes froides terminant leur course en de discrètes gouttelettes. Dans sa partie inférieure, la signature et le nom de l’œuvre, esquissés à l’aide du manche d’une brosse, sont bien distincts.  « Plus on remonte dans le temps, plus on remarque que ces tracés sont de moins en moins visibles, voire inexistants », observe Elie Messagier.


Des peintures aux couleurs chaudes apparaissent ensuite, nous faisant changer de saison. Avec des tons orangés affirmés, On bascule dans le printemps (1990) réveille le regard, au même titre que La Folie des icebergs en eau douce avec odeur de cerfeuil (1990), marquée par des touches de rose plus prononcées. Le lyrisme des titres trouve quant à lui ses origines dans les cours de poétique de Paul Valéry, auxquels participe Jean Messagier. L’artiste profite d’ailleurs de l’hiver, période durant laquelle il ne peint pas, pour les imaginer. Il réserve néanmoins cette époque de l’année à ses Gels sur toiles et papiers. « Je me souviens encore de ce projet, qu’il faisait dehors par des températures négatives, car je l’aidais en lui amenant des bacs d’eau », poursuit son petit-fils. Le procédé est aussi ingénieux que sidérant : après avoir appliqué quelques pressions de bombe de peinture aérosol, il étale une couche d’acrylique sur son support, posé à même le sol. Au contact de l’herbe gelée, les pigments se cristallisent, créant des paysages oniriques bluffants. Tantôt bleues et noires, rose flashy ou mauves, ses productions, élaborées dans sa fameuse maison-atelier de Lougres, située au bord d’un ruisseau, font écho à son engagement et intérêt continu pour la nature.


À la Fondation Fernet-Branca (Saint-Louis) jusqu’au 2 février

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