Comme un rock
En pause depuis 2010 et son dixième anniversaire, le festival C’est dans la Vallée est de retour à Sainte-Marie-aux-Mines pour une édition qui questionne le rock. Entretien avec son directeur, Rodolphe Burger.
Le festival nous invite à une immersion dans les années 1980 avec la diffusion de Nous, Enfants du rock [1. Film réalisé, en 1992, à partir d’extraits de l’émission Les Enfants du rock de 1980 à 1988. Diffusion samedi 19 octobre à la Médiathèque du Val d’Argent], documentaire à la beauté brute de Michel Vuillermet. Qu’est-ce que cette période évoque pour vous ?
C’est le moment où Kat Onoma [2. Groupe (né au début des années 1980 et s’étant éteint au début des années 2000) dont Rodolphe Burger était le leader aux côtés de Philippe Poirier ou Pascal Benoit] s’est constitué. Nous nous sentions un peu en porte-à-faux par rapport au rock alternatif qui dominait. Même à Strasbourg, nous existions en suspension, à l’écart des dispositifs d’aide instaurés par Lang. Peut-être aurions-nous mieux trouvé notre place dix ans plus tard ?
Le film nous plonge notamment dans les usines automobiles d’Audincourt ou les chaînes de montage de Sochaux. Nous croisons beaucoup de « fils de prolos qui font du rock » pour oublier leur quotidien…
À l’issue d’un concert à Rome, un journaliste nous a interviewés, Rachid Taha, Mick Jones et moi. Il voulait nous faire dire que le rock était un truc de prolos. Mick s’est insurgé, en disant que Strummer était fils de diplomate ! La dimension subversive du rock est incontestable, mais il n’est pas lié à une inscription sociale prolétaire. Je n’ai pas encore vu le film, mais une interprétation strictement sociologique m’a toujours gêné.
On voit également Daniel Darc disant qu’il doit tout au rock : « Si je lis Malraux, c’est grâce au rock, si j’ai accepté de voir un film de Godard c’est que Patti Smith a dit que c’était génial. »
C’est tout a fait vrai : le rock est une école. Rachid, par exemple, est fan de Godard, il a une culture cinématographique hallucinante qui lui est venue de la musique. Le rock n’est pas une culture étroite.
Kat Onoma a beaucoup souffert de son image d’intello ?
Les Inrocks, qui étaient fascinés par des groupes mancuniens du genre Happy Mondays, nous reprochaient de ne pas être des hooligans ! Kat Onoma n’était pas dans une forme si sophistiquée et cultivée que ça.
Qu’est-ce que “l’esprit rock” [3. L’Esprit rock est la thématique de la conférence de Fabien Hein, samedi 29 octobre à la Médiathèque du Val d’Argent] ?
Un geste, un son, un parfum, plus qu’un genre. C’est quelque chose qui s’expérimente. Ça n’est pas l’imaginaire, la panoplie, l’attitude, le décorum, qui me relient au rock.
03 89 41 19 16 les temps forts du festival Psychopharmaka d’Olivier Cadiot & Rodolphe Burger (avec Stephan Eicher…), vendredi 18 octobre au Théâtre Concert dessiné de Yaya (Herman Dune) & Charles Berberian, vendredi 18 à la Mine d’Artgens Bal rock avec Le Valley Band (reprise de “tubes”, des Clash ou James Brown, par Rodolphe Burger, Christophe, Rachid Taha…), samedi 19 au Théâtre Bertran Belin, dimanche 20 à la Chapelle de Saint-Pierre-sur-lʼHâte Photo de Benoît Linder pour Poly