Classe verte
Récompensé par une Étoile au Guide Michelin il y a peu, L’Alchémille, ouvert en 2015 par Jérôme Jaegle à Kaysersberg propose une cuisine au fort tropisme végétal que le jeune chef décrit comme « brute, mais classe ».
Après quatre ans avec Jean-Yves Schillinger au JY’S (Colmar), des expériences étoilées – notamment chez le Meilleur Ouvrier de France Christian Têtedoie – et une participation remarquée au prestigieux concours du Bocuse d’Or où il représenta la France en 2010, Jérôme Jaegle est désormais chez lui à Kaysersberg où il a grandi. Avec son épouse, le chef a repris un ancien PMU de bord de route, le métamorphosant en antre élégante, boisée et zen à l’enseigne de L’Alchémille, mettant en lumière la passion végétale qui irrigue sa cuisine : « C’est une plante comestible associée à la fertilité au Moyen-Âge. On la trouve en abondance sur les chaumes. Dernière à tenir la rosée le matin, elle est magique », explique le chef cueilleur.
Alchimiste, Jérôme Jaegle évolue entre haute gastronomie maîtrisée et inventivité débridée. No limit pourrait être la devise d’un trentenaire locavore et amoureux de son terroir, refusant de mettre des poissons de mer à une carte changeant plusieurs fois par semaine : pas de plats indiqués, juste des noms poétiques de menus (Pimprenelle, Oxalis et Alchémille) et quelques croquis, des esquisses montrant comment sont nées certaines créations. Il s’agit de faire confiance “à l’aveugle” à un chef qui se saisit d’un produit au moment de l’année le plus propice, « lorsqu’il donne sa pleine puissance. Je déteste le dénaturer », résume-t-il. On découvre son rapport frontal à la terre avec un surprenant mousseux de pommes de terre accompagné de croûtons de pain, de cressonnette, de ciboulette et d’huile d’herbes, symphonie aboutie où des pétillements végétaux presque pointillistes rencontrent un tubercule exhalant une rare douceur. Après cela, le très graphique filet de cannette – à la parfaite cuisson – accompagné d’un mille-feuilles de navet où jouent avec intelligence miel et vin rouge, pourrait presque être taxé de classique. La création reprend ses droits en fin de repas, avec un dessert où la surprenante texture d’un “gâteau éponge” marque l’improbable rencontre du persil, de l’épinard et du chocolat.
Photos de Benoît Linder pour Poly
Fermé lundi toute la journée, mardi midi et dimanche soir Menus de 24 € (à midi, en semaine) à 78 €