Edmond Rostand et Marguerite Duras sont les deux icônes de la saison estivale du Théâtre du Peuple de Bussang.
Àl’orée de ses 130 ans, le Théâtre du Peuple – Maurice Pottecher connaît une saison 2023 de transition. La nouvelle artiste-directrice Julie Delille prendra ses fonctions à l’automne, devenant la première femme à la tête de ce haut lieu d’utopie artistique, dont la devise « Par l’art pour l’humanité », inscrite de chaque côté du cadre de scène, témoigne de ses idéaux humanistes. Les deux spectacles, programmés par Simon Delétang avant son départ pour le Centre dramatique national de Lorient, couvrent deux pages intenses de la littérature française. D’abord, Cyrano de Bergerac, écrit deux ans après la fondation des lieux, en 1897. La tragédie romantique la plus connue du répertoire avec sa tirade du nez, sa verve sans pareille et l’inoubliable Depardieu dans le rôle-titre du film de Jean-Paul Rappeneau. Hasard des calendriers, c’est Rodolphe Dana (qui vient de quitter la direction du théâtre de… Lorient !) et Katja Hunsinger qui s’attaquent à cette langue magnifique d’Edmond Rostand, « inspirée d’Hugo, mais débarrassée de son emphase, touchant au sublime par la simplicité. C’est fluide, c’est un enchantement, un bonheur pour les acteurs », assure un duo qui croit, « plus que jamais, en la philosophie de Maurice Pottecher. » L’amour empêché de Cyrano pour sa cousine Roxane, conduit le disgracieux héros à protéger son grand rival Christian. Sa légendaire éloquence poétique va de pair avec des quiproquos improbables – dont le public est complice, en sachant plus que les personnages – et une flopée de rôles qui iront comme un gant au mélange de comédiens amateurs et professionnels caractéristique du grand spectacle de l’été. La seconde proposition n’a rien à envier à la première. Dans Je voudrais parler de Duras, Katell Daunis et Julien Derivaz s’intéressent à Yann Andréa, compagnon de l’écrivaine autant que personnage fictionnel de ses romans, pris dans une relation de domination absolue – mais consentie jusqu’à l’extrême – par souci de l’art. Ou peut-être par amour fou. Telles sont quelques-unes des interrogations de cette pièce dans laquelle s’entremêlent comme rarement fiction et réalité, désir et création, abandon et don de soi. Dans un retournement savoureux, voilà bien l’histoire d’un homme soumis face à une femme brillante et dévorante. Au centre de tout cela, il y a la littérature, comme toujours chez Duras. Ainsi, Julien Derivaz n’interprète-t-il pas Yann Andréa, jouant à la lisière des mots qui font l’être, à moins que ce ne soit la lettre qui dise les maux.
Au Théâtre du Peuple (Bussang), Cyrano de Bergerac du 29 juillet au 2 septembre (jeudi au dimanche, à 15h, dès 9 ans) et Je voudrais parler de Duras du 11 août au 2 septembre (jeudi au samedi, à 20h, dès 14 ans) theatredupeuple.com