Arrêt obligé au Relais de la Poste, à Strasbourg
À quelques coudées de Strasbourg,Le Relais de la Poste séduit grâce au travail mené par Thomas Koebel autour de la tradition régionale.
Vénérable maison à colombages, Le Relais de la Poste a trouvé stabilité et sérénité sous la houlette de Thomas Koebel. Au piano de l’institution de La Wantzenau depuis 2019, le chef de 38 ans, passé par les meilleures adresses (du Cygne de Gundershoffen au strasbourgeois Crocodile, lorsque brillaient les trois Étoiles d’Émile Jung), y fait montre d’exigence et de finesse mêlées. Celui qui avait fait ses armes au Secrets des Grands Express – installé dans un wagon de l’Orient Express des années 1920, posé à Geispolsheim – en réinterprétant les mets servis à la Belle époque est resté fidèle à la grande cuisine d’Escoffier, « aux plats mijotés, aux sauces travaillées ». Lorsqu’on lui demande de définir les contours de sa philosophie, il répond du tac au tac : « Une cuisine bourgeoise aux inspirations alsaciennes avec des produits d’ici ». Rien de révolutionnaire donc – dans une bâtisse pourtant érigée en 1789 –, mais de la solidité de bon aloi et de l’excellence itou au service d’une gastronomie comme on les aime, à laquelle l’Étoile au Guide Michelin est solidement arrimée depuis 2023 – reconquise en toute logique –, tout comme elle apparaît tatouée sur l’avant-bras du virtuose.
Dans son exploration décomplexée de l’Alsace, à qui il fait faire de sacrés voyages, notre homme livre une partition qui transcende les frontières gastronomiques régionales avec un foie gras de canard poêlé posé sur une choucroute confite au Picon faisant se croiser une certaine idée du fondant et une autre du craquant. Terrienne en diable, cette alliance est percutée par une émulsion de bisque de homard, nuage terriblement aérien qui emporte le dîneur sous les sunlights des tropiques par le truchement d’un caramel de fruit de la passion exotico-explosif. Autre accord majeur, les langoustines en pot-au-feu qui suivent cohabitent paisiblement avec une raviole de quenelles de moelle – Marikknepfle en dialecte – faisant trempette dans un bouillon de boeuf au Maggi végétal exhalant mille et une fragrances. Enfin, impossible d’oublier un pigeon (de chez Théo Kieffer, of course) avec sa déclinaison duale : une poitrine au foie gras et lard s’évadant de l’autre côté de la Méditerranée grâce aux saveurs du mélange Dukkah (noisettes, sésame, coriandre, cumin, etc.) et une cuisse en cromesquis jouxtée par quelques raisins rôtis, l’ensemble étant accompagné de Rahmlapple – souvenirs d’enfance du chef –, fameuses ravioles à la crème du coin, ici rehaussées par l’astringence du sumac. Décidément, l’Alsace de Thomas Koebel est tout sauf plan-plan…
Le Relais de la Poste est situé 21, rue du Général de Gaulle (La Wantzenau). Ouvert du mercredi au samedi ainsi que le mardi soir. Menus de 47 à 129 €