Antibalas : un afrobeat made in Brooklyn
Fidèle au son comme à l’esprit de Fela Kuti, le commando musical Antibalas continue de faire groover son afrobeat made in Brooklyn.
« La musique est une arme », disait Fela Kuti. Pour le big band new-yorkais Antibalas (mot espagnol signifiant ”à l’épreuve des balles”), elle est acte de résistance. Fondé à Brooklyn en 1998, un an après la mort du grand prêtre de la musique africaine, ce collectif à géométrie variable a vu passer pas moins de quarante instrumentistes, s’est produit dans plus de trente-cinq pays, du Japon au Portugal, a joué avec The Roots, Public Enemy, Paul Simon, Amadou et Mariam… La liste est longue comme le bras. Fer de lance de l’afrobeat occidental, le son d’Antibalas enchevêtre les rythmes, alliant le groove latin funk aux jams enfiévrées des nuits nigérianes avec leurs mitraillettes de cuivres et de percussions. L’effet est orchestral, plein d’une énergie endiablée et d’une crépitante liberté. Au centre de cet ensemble se trouve le charismatique Duke Amayo. Grand et imposant avec sa coiffe colorée, ce maître de kung-fu a grandi à Lagos, où il était un habitué des soirées du Shrine – le club légendaire de Fela –, avant de s’installer à Williamsburg au milieu des années 1990. Avec le saxophoniste baryton Martin Perna, il forme le noyau dur de ce groupe virtuose connu pour ses sets à la puissance viscérale, où la pulse afro-funk renoue avec la transe sous le flow d’un chanteur griot imprécateur, dénonçant la main mise des multinationales sur l’Amérique ou la gentrification galopante des faubourgs de la Grande Pomme.
Fidèle à l’esprit des origines, l’afrobeat des Antibalas est aussi festif, mystique et politique que l’était celui du Black President. Pour les musiciens de la formation new-yorkaise, comme pour ceux du mythique Africa 70 en son temps, un concert de trois heures, c’est la normale. Quand ils doivent faire moins, ils sont frustrés ! Une générosité qu’on retrouve sur leurs albums, dont Fu chronicles sorti en 2019. Quarante-huit minutes pour seulement six titres… En ouverture, Amenawon se déploie lentement au son des harangues en langue yoruba chantées par Amayo, avant de se lancer dans une explosion mélodique en hommage à sa défunte mère autant qu’à la déesse de l’eau, Yemoja. Le morceau prépare l’auditeur à ce qui va suivre, et notamment à la pièce maîtresse de l’opus, Fight Am Finish, dans laquelle la voix du conteur sorcier ponctue les sections de cuivres en convoquant les dieux guerriers Ogun et Seshat pour qu’ils le galvanisent dans la lutte spirituelle et ancestrale de l’Homme pour la vie.
À La Cartonnerie (Reims) mercredi 11 mai, aux Trinitaires (Metz) mardi 17 mai et au Parc de la Combe à la Serpent (Dijon) samedi 11 juin dans le cadre du Vyv Festival
antibalas.com
Édité par Daptone Records
daptonerecords.com