Fini les conneries
Faisons simple. Basique. Orelsan n’est plus un paria, cible de tous ceux qui confondent fiction et réalité, mais un « auteur » apprécié, capable de transformer avec humour la lose en or. Rencontre.
« J’ai mis la moitié de ma vie à savoir ce que je veux », annoncez-vous sur votre dernier album. Que voulez-vous au juste ?
C’est marrant parce qu’on m’a déjà posé la question et je ne savais pas quoi répondre… En fait, si : je veux continuer à créer, à faire de la musique et du cinéma pour être heureux. C’est lorsque j’écris que je me sens le mieux !
Quelles sont vos bases ?
J’essaye d’être le plus possible en accord avec moi-même dans mon quotidien. Ça n’est pas toujours facile, mais je cherche à être agréable et à faire des choses que je ne regretterai pas. Je crois être quelqu’un de gentil…
Que retenez-vous de “l’épisode Sale pute” ?
Ben c’est un peu comme les acteurs de Game of Thrones qui se font insulter dans la rue ! Je jouais un rôle lorsque je chantais ce morceau, mais certains ne l’avaient pas entendu ainsi à l’époque…
Vous représentez le “rap middle class” : c’est dur de rapper un quotidien moyen ?
C’est moins fort que de raconter sa vie de vendeur de drogue à Brooklyn, mais ça me permet de me distinguer. Il y a les films d’action d’un côté et ceux de Woody Allen de l’autre. Ce qui est vraiment difficile, c’est de se renouveler, quelque soit son style.
Vous avez plus d’affinités avec le rap anglais qu’américain…
Oui, j’adore Wiley, présent sur la BO de mon film Comment c’est loin, et bien sûr Dizzee Rascal que j’ai rencontré lors d’une soirée. Je lui ai fait écouter ce que je faisais et il m’a proposé de chanter sur mon nouveau disque. Jamais je n’aurais osé le lui demander… Si je me sens si proche de la scène anglaise, c’est sans doute parce que je viens de Caen. À Strasbourg, vous devez connaître plein de rappeurs allemands, non ?
À part Puppetmastaz, pas vraiment… Je voulais vous citer une réplique de Bloqués, votre shortcom réalisée pour Canal+ : « Avec Tinder, t’as L’île de la Tentation dans ta poche, juste à côté de ta teub ! » Cet extrait est une parfaite punchline. Écrivez-vous vos morceaux comme vos sketches ?
Oui, sauf que pour Bloqués, nous étions six ! Nous prenions beaucoup de notes et vidions nos sacs de vannes pour construire des épisodes. J’écris beaucoup : une phrase peut donner lieu à un morceau, un couplet ou à rien du tout. Souvent, il faut que je trouve quarante autres idées pour mener un concept à bien. Au départ, le titre Défaite de famille décrivait de manière mignonne une fête très cool : je disais qu’on était bien, là, tous ensemble. Mais au final, je raconte complètement le contraire et c’est beaucoup plus intéressant comme ça !
Vous vous êtes inspiré du Festen de Thomas Vinterberg ?
Complètement ! Et puis la séquence du diner familial est récurrente dans les comédies françaises, avec le speech bizarre du mec bourré à la fin du repas de mariage… Mon morceau Suicide social, sur mon album précédent (Le Chant des Sirènes) est un clin d’œil à La 25ᵉ heure de Spike Lee, notamment la scène où Edward Norton fait un long monologue devant un miroir : « J’emmerde cette ville et tous ses habitants, etc. »
Quelles étaient vos influences pour Comment c’est loin, film où vous mettez en scène la lose et l’ennui ?
Je me suis beaucoup référé à la série Girls et aux réalisateurs indépendants américains : Richard Linklater (Rock Academy, Boyhood), Kevin Smith (Clerks) ou Noah Baumbach (Les Berkman se séparent, The Meyerowitz Stories). Je voulais faire un film “à la Sundance” [rires] !
Vous êtes un gars responsable… C’est définitivement fini, les soirées “shit, Despé et Playstation” ?
Ça m’arrive encore, mais rarement…
Au Zénith (Dijon), samedi 10 février Au Zénith Europe (Strasbourg), jeudi 1e mars À l’AccorHotels Arena (Paris), jeudi 15 et vendredi 26 mars