Cabaret & Tango
Temple de la musique classique, le Festspielhaus délaisse, pour deux soirées, Beethoven, Tchaïkovski et consorts pour accueillir deux voix envoûtantes : Ute Lemper et Max Raabe.
Aujourd’hui, Max Raabe est devenu une star internationale : ses shows remplissent le Metropolitan Opera ou la Salle Pleyel. Tout avait commencé à Berlin, à la fin des années 1980 : alors apprenti chanteur (lyrique), celui qui s’appelait encore Matthias Otto fonde, avec quelques amis, le Palast Orchester, une formation dédiée à la (re)découverte des musiques de l’entre-deux-guerres. Ambiance Ange bleu, chansons populaires et cabaret. La recette du succès ? Un répertoire inédit et passionnant allié à une voix à nulle autre pareille, suave et cassante, tendre et caustique. Une tessiture improbable, venue du passé, qui séduit. Les voilà sur scène avec leur dernier projet : intitulé Küssen kann man nicht alleine… Tout un programme !
Le lendemain, le Festspielhaus reçoit Ute Lemper pour un hommage au maître du tango Astor Piazzola… et quelques incursions dans les univers de Jacques Brel ou Kurt Weill. Trouvant, comme Max Raabe, ses racines musicales dans le cabaret berlinois de la République de Weimar, parenthèse (presque) enchantée entre les Orages d’acier de la première guerre mondiale et la botte nazie, la chanteuse allemande se fit connaître en France en 1987, dans le Cabaret de Jérôme Savary, où elle incarnait Sally Bowles. Mais son répertoire ne se limite pas à ces musiques “dégénérées” fichtrement régénératrices. Elle se promène en effet dans un univers protéiforme où se rencontrent Sting (avec une version inspirée de Moon over Bourbon Street), Édith Piaf, Tom Waits, Van Morisson et, désormais, Astor Piazzola. Dans ses concerts en outre, Ute Lemper s’amuse, implique le public, entraînant les spectateurs dans sa cavalcade musicale lascive, dialoguant sans cesse avec eux, jouant avec les mots… La chanteuse aime les textes et leurs alliances surprenantes, souvent sensuelles comme dans un de ses albums les plus connus, Espace indécent (musiques composées par Art Mengo, 1993) : « De l’espace indécent / Silencieusement s’étend / La Sève immobile / D’espérances peu dociles. »
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