Jazz à tous bords
La richesse du festival Jazzdor se mesure à sa diversité musicale. Des stars du genre aux découvertes comme la charismatique flutiste Naïssam Jalal, un voyage au multiples facettes.
Dans leurs bureaux de la rue des Frères, à une centaine de mètres de la Cathédrale, Philippe Ochem et son équipe mènent leurs affaires à l’année. Et dans le petit monde du jazz, les dingues de musiques improvisées ont un grand respect pour les irréductibles Strasbourgeois, eux qui mettent en lumière ces créateurs oubliés des grandes sphères médiatiques. La journée du 12 novembre de Jazzdor est un reflet du spectre musical que couvre le festival. Il y a le solo hyper rythmique du batteur suisse Julian Sartorius (15h, CEAAC) suivi du Tribute to an imaginary folk band des Bedmakers (17h, CEAAC), un voyage vers les contrées de la musique folk anglo-saxonne, avec des restes de blues dans les tripes. La soirée sera réservée à la réunion de trois figures hautement respectées dans New Sanctuary (20h30, Centre socio-culturel du Fossé des Treize), rassemblant de “jeunes vétérans” dont la seule étiquette est l’excellence. Les projets du trompettiste américain Dave Douglas sont hyper créatifs, surtout avec des collaborateurs comme Marc Ribot, un guitariste majeur au talent hors normes, toujours fourré dans les grands coups – Tom Waits, Bashung, Archie Shepp – et Susie Ibarra, batteuse américaine récompensée de multiples prix par les magazines spécialisés, collaboratrice de beaux noms du free jazz américain (Wadada Leo Smith, Matthew Shipp, Craig Taborn…), du hip-hop (Prefuse 73) ou d’autres genres.
Ce qui fait aussi balancer nos petits cœurs de passionnés ? Le concert des Rhythms of Resistance de Naïssam Jalal (16/11, Centre culturel Claude Vigée, Bischwiller), flûtiste franco-syrienne habitée par une fibre spirituelle où les traditions musicales religieuses de transe et de silence rejoignent le jazz modal tel que John Coltrane a pu le développer. N’oublions pas six musiciens réunis pour un hommage à la périphérie intitulé Kit de Survie en zone sensible (15 & 16/11, TNS). Très politique, le projet réunit, autour de Serge Teyssot-Gay, des musiciens aussi doués que connus pour leur engagement : le rappeur Mike Ladd, le génial et déluré multi-instrumentiste Médéric Collignon et le saxophoniste Akosh S. Ils s’attacheront ensemble à faire entendre que l’axiologie suscitée par les normes devrait toujours être questionnée, que les périphéries sont des espaces de liberté justement parce qu’ils sont à la marge. Comme Jazzdor qui s’attache depuis plus de trente ans à défendre une musique libre et créative.