Bons Baisers de Russie
Magnifique portrait d’une femme amoureuse face à l’horreur stalinienne, Le Tour de valse laisse la musique transcender les images dans un BD-concert à fleur d’émotion.
Avec L’Archipel du goulag, Soljenitsyne ouvrait les yeux de l’Occident sur la réalité soviétique : dix-huit millions de personnes emprisonnées entre 1917 et 1953, un système carcéral basé sur la torture… C’est sur cette toile de fond que se déroule la BD de Ruben Pellejero (futur dessinateur des nouvelles aventures de Corto Maltese) et Denis Lapière publiée en 2004, chez Dupuis. Le Tour de valse est une poignante histoire d’amour. En 1953, à la mort de Staline, des milliers de prisonniers reviennent des camps, mais nulle trace de Victor, condamné sept ans plus tôt. Son épouse Kalia prend la route de Sibérie pour tenter de le retrouver. Patiemment, elle mène son enquête, interrogeant d’anciens zeks – les détenus du goulag – qui lui révèlent l’horreur de leurs conditions de vie. Elle découvre aussi ce qu’était un “tour de valse”, au cours duquel Victor a fait la rencontre de Varvara, détenue, elle aussi, pour activités antirévolutionnaires : une récompense perverse pour les meilleurs travailleurs socialistes, enfermés deux heures durant avec leurs homologues féminines dans un baraquement du camp.
De cette petite histoire dans la grande, en bulles et en images, les musiciens Tony Canton et Jean-Pierre Caporossi ont inventé un étonnant spectacle, sous forme de BD-concert. Projetée une à une sur un écran géant, dans un jeu de cadrages et de zooms, chaque vignette de l’album est accompagnée par une partition interprétée en direct. « Nous voulions renforcer l’impact cinématographique de la bande dessinée en lui donnant du rythme musicalement. Le challenge était que le spectateur ne soit pas tiraillé entre le fait de lire une bulle, d’être séduit par l’image et en même temps attiré par la musique, mais qu’il soit vraiment dans un tout », explique le pianiste Jean-Pierre Caporossi. Pour composer cette partition qui nourrit à la fois la psychologie des personnages, l’intrigue romanesque et la noirceur d’une époque, les deux compères se sont plongés dans la musique russe du XXe siècle, dont l’inspiration se mêle à la technique du leitmotiv chère à Wagner ou à la musique répétitive façon Steve Reich. Sous les sons lancinants des instruments – piano, claviers, violon, clarinette et percussions –, la puissance des dessins atteint une dimension nouvelle, où fusionnent les gestes artistiques : le trait du dessinateur, le mot du scénariste, la note du musicien.
À Kembs, à l’Espace rhénan, samedi 11 avril www.espace-rhenan.fr À Riedisheim, à La Grange, mardi 14 avril www.riedisheim.fr À Thann, au Relais culturel, jeudi 16 avril www.relais-culturel-thann.net À Bischheim, à la Salle du Cercle, vendredi 17 avril http://salleducercle.ville-bischheim.fr À Schiltigheim, au Cheval blanc, samedi 18 avril www.ville-schiltigheim.fr À Haguenau, au Théâtre, samedi 25 avril www.relais-culturel-haguenau.com