Le Rendez-vous pas comme les autres avec Camille Cottin
Dans Le Rendez-vous, Camille Cottin incarne un personnage irrévérencieux en pleine transition de genre, imaginé par la romancière Katharina Volckmer.
En 2021, sort en France Le Rendez-vous (Jewish Cock en V.O.), premier roman explosif de Katharina Volckmer, écrivaine allemande vivant en Angleterre. Dans ses pages se dessine le parcours d’une jeune femme cynique et subversive qui, allongée sur la table d’auscultation d’un gynécologue, entreprend de changer de sexe. Au cours de l’opération, le lecteur la rencontre à travers l’évocation de son passé, ses fantasmes, son rêve de s’être transformée en Hitler, la nuit dernière, ses secrets confiés à son psy ou encore son étrange histoire d’amour avec un homme marié. « Nous l’avons appelée Katharina, mais dans le livre, elle n’a pas de nom », précise Camille Cottin. Si l’actrice et comédienne cherchait une histoire à adapter au cinéma, la découverte de ce monologue a fait naître l’envie de le partager sous forme théâtrale. « Il s’est imposé ainsi, et c’est d’ailleurs la première fois que je me retrouve seule sur scène », ajoute-t-elle. Sur les conseils de son ami Benjamin Gauthier, elle contacte le metteur en scène Jonathan Capdevielle, pour qui les thèmes liant famille, sexualité et questions de genre sont familiers. Bien que le docteur ne prononce pas un mot dans l’oeuvre originale, il bénéficie ici d’interventions ponctuelles : « On entend la voix de Jonathan ou Benjamin, en direct. Il n’est toutefois pas représenté physiquement, car cette consultation a une dimension onirique, l’univers scénique et les costumes sont abstraits, ils incarnent une pensée, un rapport au temps, quelque chose de l’ordre de la transformation. Si on l’avait matérialisé, on échappait à cette parabole », explique Camille Cottin.
Tantôt enroulée dans l’immense rideau en velours violet tombant sur le plateau, coiffée d’un immense chapeau tressé ou enfouie dans un pantalon de treillis et une veste en cuir, l’interprète campe une protagoniste à différents âges de sa vie, qui se glisse aussi dans la peau de sa mère. « J’aime beaucoup quand l’artiste parle de la place de la femme dans la religion et de féminisme », reprend la comédienne. « Évidemment, sur les 200 pages du récit, nous n’avons pas tout gardé. Je crois qu’il en reste 37, c’est un patchwork des moments qui nous ont marqués. » Parmi eux, elle cite le passage du chat qui aboie, renvoyant à la façon dont son personnage se définit et sa difficulté à s’adapter à la société. En faisant de son corps une marionnette évoluant, parfois, au rythme de Wonderwall d’Oasis, toutes les pensées qui la traversent prennent ainsi forme. On songe par exemple à la blondinette aux cheveux courts, une corne de licorne rose perchée sur la tête, allusion à la petite fille innocente qu’elle était et dont elle se remémore l’existence. Et quand on lui demande pourquoi le violet irradie tout du long – référence aux fleurs de magnolia évoquées dans le livre, symbolisme du rêve, de la spiritualité, de l’amour caché ? –, Camille promet que la réponse sera donnée… à la fin !
Au Théâtre national de Strasbourg du 11 au 22 mars