Théorie du genre
La 19e édition de Pisteurs d’Étoiles met en lumière la place des femmes dans le cirque actuel. Plus généralement, le festival obernois questionne l’utilisation du corps pour parler du monde.
Il s’agit d’une année particulière, marquée par la future labellisation du festival, en association avec Les Migrateurs de Strasbourg, comme Pôle national des Arts du Cirque.
À Obernai, sous trois chapiteaux (un de plus que les années précédentes), Pisteurs d’Étoiles, manifestation d’envergure internationale, zoome sur « le cirque d’auteur » et insiste sur la féminisation d’une pratique. Illustration dès le coup d’envoi avec Morsure de la compagnie Rasposo : une écriture scénique très forte pour un show acrobatique et poétique, mis en scène par Marie Molliens. Et confirmation lors du dernier jour, avec Soritat de la compagnie Timshel, création pour dix artistes – la voix de cinq chanteuses occitanes associée aux mouvements de cinq circassiennes-danseuses –, « exploration des archétypes du féminin » se basant sur le livre Femmes qui courent avec les loups signé Clarissa Pinkola Estés.
Autre spectacle qui questionne la place des femmes au cirque, celui, éponyme, de la compagnie Le Poivre rose, posant un regard sur le genre : « Comment le corps circassien est vu par les autres sur le plateau ? Une discipline est-elle plus masculine ou féminine ? Qu’est-ce qui fait que peu d’hommes font du tissu aérien alors qu’ils sont nombreux à faire de l’acrobatie main à main ? », s’interroge Adan Sandoval, directeur de l’Espace Athic et du festival. Selon lui, « la femme est en train de gagner en espace, d’occuper une place qui ne lui était pas accordée. Le cirque pose la question de l’égalité : je trouve ça important pour sa santé. En paraphrasant André Malraux, je dirais que le cirque sera féminin ou ne sera pas. Une régulation nécessaire est en train de se faire de l’intérieur. »
Selon Adan Sandoval, la question reste de savoir « ce qu’on veut dire » avec son bagage technique et « son corps magnifique et super entraîné ». Au cours de Cherepaka, la contorsionniste Andréane Leclerc retranscrit en langage corporel les écrits de Gilles Deleuze sur Francis Bacon. Une proposition innovante, révélatrice des préoccupations des « auteurs » présents à Pisteurs d’Étoiles : « C’est essentiel d’avoir un beau pinceau, mais encore faut-il savoir ce qu’on veut peindre ! »
03 88 95 68 19 Quelques spectacles à voir : Morsure de la compagnie Raspaso, vendredi 25 avril à 21h, samedi 26 à 20h30 et dimanche 27 à 17h30, Chapiteau 2 Cherepaka de Nadère Arts Vivants, mardi 29 avril à 20h30, Chapiteau 1 Soritat de Timshel, vendredi 2 mai et samedi 3 à 20h30, Chapiteau 1