Les Détours des Bibliothèques idéales font leur Révolution
Ponctuant l’année littéraire, les Détours des Bibliothèques idéales invitent à explorer La Révolution en nous pour leur session automnale.
L’expérience fut éphémère, mais marqua durablement la ville : après l’Armistice du 11 novembre 1918, profitant d’une situation confuse, l’Empire de Guillaume II – auquel l’Alsace appartient – voit fleurir les élans révolutionnaires. À Strasbourg, un Conseil des soldats et des ouvriers est institué. Le 13 novembre, le drapeau rouge flotte sur la Cathédrale ! L’aventure de ce soviet ne durera guère, puisque les troupes françaises rétablissent l’ordre le 22 novembre. Une promenade littéraire (03/11, place Kléber) avec l’historien Jean-Claude Richez revient sur cet événement avec le regard ironique et tendre d’Alfred Döblin, comme un symbole de ces Détours des Bibliothèques idéales accueillant de grands témoins. Parmi eux, le nouveau Secrétaire perpétuel de l’Académie française, Amin Maalouf (03/11), qui publie Le Labyrinthe des égarés (Grasset), magistral essai géopolitique remontant aux sources du déclin de l’Occident, en explorant les trajectoires de ceux qui ont contesté sa suprématie au fil des âges : Japon impérial, Russie soviétique et, aujourd’hui, Chine communiste. Sont également invités un habitué de la manifestation, Edwy Plenel (05/11) – qui propose, dans Se Tenir droit (Seuil), des exercices d’admiration autour des figures de Zola, Trotski, etc. – ou encore l’ancien Premier ministre Édouard Philippe (03/11), évoquant une géographie française fondatrice avec Des Lieux qui disent (Lattès).
Festival multiforme, les Bibliothèques idéales ont la particularité de proposer également concerts et autres spectacles, comme le récital littéraire de l’écrivain Pascal Quignard et de la pianiste Aline Piboule (03/11) autour de la Fantaisie de Schumann. Pensons aussi à Élie Guillou (05/11) qui chante et dit le peuple kurde avec grande poésie ou à une clôture très attendue, Lettres à un poète disparu. Lamine Diagne et Matthieu Verdeil honorent Claude McKay, figure du Harlem Renaissance qui croisa Trotski : slam, jazz et hip-hop s’entremêlent dans un océan de mots et d’images… De rencontre dédiée à L’Affiche rouge (04/11, avec notamment Didier Daeninckx et Robin, qui chante les ballades de Ferré sur des textes d’Aragon) en confidences autour de la Cinquième République par des observateurs politiques de premier plan (Michèle Cotta, Catherine Nay et Jean-Luc Barré, 05/11), le programme s’annonce dense et tonique. Notre coup de cœur ? Un hommage aux poètes russes du XXe siècle par le chanteur des Têtes Raides Christian Olivier et le traducteur André Markowicz, accompagnés de quatre musiciens (04/11). Les textes de Maïakovski, Akhmatova, Mandelstam, Tsvetaïeva, etc. s’entrecroisent dans un tourbillon de notes avec, pour épine dorsale, un chant révolutionnaire bien connu qui proclame : « Nous détruirons le monde d’avant, jusque dans ses fondements, pour bâtir notre monde à nous, qui n’était rien deviendra tout. »
À la Cité de la Musique et de la Danse (Strasbourg) du 2 au 5 novembre