ascendant vierge : le monde à la loop
Le duo franco-bruxellois ascendant vierge surfe sur le revival de la techno hardcore avec des textes hauts perchés et désenchantés.
Réunir les plus de 30 ans biberonnés aux compil’ Thunderdome – et au festival éponyme – dédiées aux grandes heures du gabber, la techno hardcore si populaire aux Pays-Bas et en Belgique, et la génération Z saturée de rap. Voilà le tour de force d’ascendant vierge, combo chanteuse pop (Mathilde Fernandez) et DJ membre du collectif et label Casual Gabberz (Paul Seul), pas pour rien dans le retour en grâce du genre qui se taille une place dans tous les grands festivals. Côté pile, des prods musicales qui pulsent, qui tapent, qui tabassent et qui décoiffent, sans crier gare, fidèles à une ligne de partage des basses et des BPM, versant survolté assumé. Côté face, une voix haut perchée, passant parfois en tête, susurrant à l’envie, sans besoin de pousser trop, tant les machines se donnent à fond. Des airs de Mylène Farmer, jusque dans les textes désenchantés contant l’époque à en crever. L’équilibre semble parfois précaire. Souvent ténu. Toujours tenu. Les paroles, aussi doucement mais consciemment cisaillées que les sons, agressent et agitent sacrément le palpitant. Pas de topliner pondant des airs sur-mesure, mais un art de la mélodie vocale et du refrain à se pâmer parfois, tranchant franchement avec les instrus sauvages qui l’entoure. L’impression de filer à toute berzingue sur une route nationale, fenêtres ouvertes aux quatre vents, les watts défiant les lignes blanches qui défilent et l’amertume de ces seuls moments où l’on se sent vivant.
Le groupe signait au printemps de cette année Une Nouvelle chance, album hyperprotéiné, maturé trois ans durant, dopé à la fureur de vivre et à l’ivresse de Jeux d’enfants, où l’on se lance Un Défi, très « Cap ou pas cap ? » façon Canet / Cotillard. Sur la pochette, ils posent devant la carlingue explosée de leur bolide des airs en combinaisons de pilotes orange, regard mutin pour Mathilde et touffe blonde peroxydée pour Paul. Look travaillé et hyper léché aux airs vintage des nineties, flirtant avec le mauvais goût, mais qui demeure l’âge d’or de leurs premiers émois musicaux. Le mélange détonne et étonne, capte les humeurs de l’époque, bloquées IRL (« Désaccorder l’esprit du corps / Mélodie née sans accord / J’me suis cachée, à tort / Pour renverser ce décor… ») ou coincées par la bienséance du jeu social aux dépens de ses aspirations intérieures (Dedans). Le titre éponyme (Une Nouvelle chance) mêle adroitement mots perdus et forme de tempête machinique qui n’a rien à envier à celle d’Au Top, vertige du réel en boucles, presque rappées, qui font voir le monde en loop ! Un Monde où tu n’existes pas, celui d’une relation toxique. La voix cristalline de Mathilde invite à la fuite de l’autre, et de toutes ses réalités, car la vraie vie est ailleurs.
À La Vapeur (Dijon) jeudi 12 octobre, à la BAM (Metz) vendredi 13 octobre et à La Laiterie (Strasbourg) samedi 14 octobre