Bizet, Wagner, Haendel, Strauss… Entre créations et reprises, zoom sur la dense saison 2022-23 du Badisches Staatstheater Karlsruhe où les mises en scène sont souvent disruptives.
Dirigé depuis 2021 par Ulrich Peters, le Badisches Staatstheater Karlsruhe – membre de l’initiative Kultur in Karlsruherassemblant plus de 30 institutions de la cité – a présenté il y a peu un programme d’une belle densité où le maître des lieux reprend notamment sa Flûte enchantée (29/10-15/01). Il y déploie une vision pétillante, impertinente et colorée de l’opéra de Mozart, refusant tout intellectualisme, histoire de s’adresser en finesse à toute la famille. Il s’attaque de plus à La Bohème de Puccini (24/06-21/07), qui fait l’objet d’une production attendue à la fin d’une saison où l’on trouve aussi un Fliegende Holländer de Wagner (10/12-18/05) annoncé d’anthologie. Aux manettes officiera Ludger Engels, qui a le vent en poupe dans l’aire germanique.
Autre tube, Carmen (21/01-20/05) sera incandescente. Immo Karaman lance en effet l’héroïne de Bizet dans un tourbillon où la volupté côtoie la mort. Eros et Thanatos. À travers les yeux de Don José, les frontières entre la réalité et la folie se font incertaines, invitant le spectateur à tourner son regard vers les recoins les plus sombres de la psyché humaine. Parmi les huit reprises qui piquètent la saison, mentionnons Aida de Verdi (25/09-16/02) : la vision qu’en donne Jasmina Hadžiahmetović fait fi de la monumentalité qui colle aux basques de la pièce. S’y trouvent bien un immense Sphinx et quelques reliefs égyptiens, mais ils évoquent plus des vestiges archéologiques que les fastes des pharaons… Voilà qui permet de se concentrer sur l’essence de la partition : l’intimité des relations entre les différents protagonistes. Nous allions oublier la géniale et transgressive Salomé (16/10-29/12) où Sláva Daubnerová questionne l’œuvre de Richard Strauss à l’aune des abus sexuels sur mineurs commis par le prédateur Jeffrey Epstein.
Plus sages seront les traditionnelles Händel-Festspiele (17/02-03/03) où sera créée une nouvelle mise en scène d’Ottone, Re di Germania (17/02-03/03), page de 1719 rarement donnée et tirée des vies des souverains du Xe siècle, Othon Ier et Othon II. Pirates, amours contrariées et autres rébellions sont au menu de cette pépite baroque. Enfin, la maison allemande présente aussi une belle saison de ballet : parmi les créations 2022-23, impossible de manquer Maria Stuart (16/04-16/06) où Bridget Breiner chorégraphie la pièce de Schiller narrant l’affrontement, à la fin du XVIe siècle, de deux souveraines, la reine d’Écosse et Élisabeth Ire qui se manifeste ici par l’opposition entre les musiques du Britannique Benjamin Britten et de son homologue écossais James MacMillan.
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