À l’Opéra-Théâtre de Metz, Paul-Émile Fourny monte la trop rare Mireille de Gounod, explorant avec finesse la destinée dramatique du personnage.
À Metz, la fin de saison prend des accents provençaux. Aux côtés d’un spectacle en deux soirées sur les Lettres de mon moulin, signé Philippe Caubère (11 & 12, puis 13 & 14/05) se déploie en effet Mireille de Gounod. Après l’avoir monté à Nice et à Toulon – avec la divine soprano albanaise Ermonela Jaho dans le rôle-titre, qui se produisait pour la première fois en France –, Paul-Émile Fourny en propose une nouvelle mise en scène avec à l’esprit les mots du compositeur cités par André Second dans sa biographie : « Il faut que cette âme lumineuse meure devant la mer inondée de soleil. C’est une messe en blanc et non en noir qu’il lui faut. » Autour de ce mot d’ordre on découvre l’histoire dramatique d’une fille de riche propriétaire : amoureuse du pauvre vannier Vincent, elle repousse son promis, l’aisé bouvier Ourrias. Voilà le point de départ de la tragédie amenant Mireille à la mort aux Saintes-Maries-de-la-Mer après une marche éreintante dans le désert de la Crau.
Au plateau, le directeur de l’Opéra-Théâtre de Metz s’est inspiré de The Red Dress, projet de l’artiste britannique Kirstie MacLeod : entre 2009 et 2022, une robe rouge à traversé le monde, s’enrichissant de nouvelles broderies à chaque étape pour créer un vêtement unique confectionné par 343 personnes originaires de 46 pays. Il est au centre de cette production : ainsi la scène d’ouverture où des magnanarelles cueillent des feuilles de mûrier destinées aux vers à soie, le matin de la Saint-Jean, se déroule-t-elle dans un atelier. Dans cet espace, le métier à tisser sert à la réalisation symbolique de cette robe représentant « la vie de Mireille, son fardeau en quelque sorte. Dans une société patriarcale, elle incarne une anti-Carmen, peinant à affirmer ses choix amoureux. Son rapport avec son père rappelle celui de Gilda et de Rigoletto », résume le metteur en scène. Cet opéra de l’oppression patriarcale ressemble à une variation sur le mariage forcé – « une thématique qui n’a pas perdu de son actualité sur la planète, malheureusement » – plaçant en pleine lumière, « comme souvent chez Gounod, un personnage féminin dont la figure maternelle est absente à l’image de Roméo et Juliette ou Faust. » Servie paru une distribution prometteuse – on attend beaucoup de la soprano Gabrielle Philiponet dans le rôle-titre – cette production hautement symbolique se déroulant à l’époque voulue par le compositeur, invite à se plonger dans le romantisme à la française d’une infinie délicatesse, nimbé de folklore provençal de la partition.
À l’Opéra-Théâtre (Metz) du 3 au 7 juin
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