Nature & Culture au Festival de Musique de Sarre
Se déployant dans des lieux insolites, l’édition 2021 du Festival de Musique de Sarre s’intéresse aux Origines. Entre industrie, nature et sonorités raffinées, l’événement tisse de subtils liens.
Après l’annulation de l’édition 2020 et une première partie 100 % numérique du cru 2021, retour aux choses sérieuses pour une manifestation polycentrique et exigeante, dont « l’esprit est transnational, européen, franco-allemand et intergénérationnel. Notre objectif est de jeter des ponts entre les jeunes et les moins jeunes, entre les différents genres, entre les grands de demain et les stars du classique », explique Eva Karolina Behr. Et Bernhard Leonardy, qui partage avec elle la direction artistique du festival, de renchérir : « Nous avons choisi de faire entrer en résonance la musique et la nature – avec des œuvres où ce thème est central – et des lieux atypiques, industriels pour la plupart. » Illustration avec La Création de Haydn (24/09) donnée dans les Fonderies de Sarrebruck fermées en 2020. Inspiré à la fois de la Bible (Genèse et Psaumes) et de l’immense poème épique et religieux qu’est le Paradis perdu de John Milton, cet oratorio se situe sur la ligne de crête entre équilibre classique et romantisme naissant : si les racines de l’œuvre sont à trouver chez Bach et (surtout) Haendel, elle annonce en effet Beethoven avec limpidité.
Autre grand moment, la création mondiale de L’Âge ingrat (11 & 12/09, Völklingen) : dans le mastodonte de fer de la Weltkulturerbe Völklinger Hütte – complexe sidérurgique de 600 000 mètres carrés qui cessa son activité en 1986 – se déploie un monodrame pour un acteur et deux pianistes composé par Stefan Litwin et adapté de Jean Paul. « Un véritable opéra de poche plein de surprises permettant d’explorer l’univers d’un des plus grands écrivains allemands qui imagina une relation nouvelle à la nature », résume Bernhard Leonardy. Des voix séraphiques a cappella de l’ensemble VOCES8 (16/09) résonant devant les vitraux signés Gerhard Richter de l’Abbaye bénédictine Saint-Maurice de Tholey – dans un répertoire allant des polyphonies médiévales aux sonorités jazzy – à un ciné-concert du film réalisé en 1927 par Walter Ruttmann, Berlin, symphonie d’une grande ville (10/09, Zeltpalast Merzig), en passant par un pique-nique en musique (26/09, Deutsch-Französischer Garten, Sarrebruck), le programme a la semblance d’un heureux tourbillon. Notre coup de cœur ? Le Gustav Mahler Jugendorchester (en photo) dirigé par Renaud Capuçon (01/10, Industriekathedrale Alte Schmelz St. Ingbert) pour un programme Mozart / Schubert. « Depuis des décennies, cette phalange réunit les meilleurs jeunes instrumentistes du monde entier. Elle déborde d’énergie et il est possible de sentir l’envie des musiciens jusqu’au dernier rang du public », conclut Eva Karolina Behr.
En Sarre, du 10 septembre au 5 octobre
musikfestspiele-saar.de