Double jeu
Depuis deux décennies, Jean-Luc Falbriard, directeur du Kafteur, titille les zygomatiques des Strasbourgeois avec son théâtre d’humour. Entretien avec celui qui incarne le Capitaine Sprütz, son double.
Comment le très “local” Capitaine, avec ses sketches et ses odes à la tarte flambée, peut avoir une dimension interplanétaire ?
Sa spontanéité et sa silhouette le rendent sympathique à tous : il dit les choses comme elles lui viennent. C’est le cas pour les Alsaciens quand ils se lâchent. Ses réactions à un phénomène de société, à des événements politiques ou à un problème écologique ont un caractère universel.
Le Kafteur a-t-il été créé pour offrir à Sprütz « une base terrestre où s’exprimer » ?
Mise à part La Choucrouterie, il n’y avait pas de lieu dévolu à l’humour. J’ai testé mon personnage du Capitaine Sprütz à Paris, au milieu de gens comme Dany Boon… mais j’avais envie de lancer quelque chose dans la région, pour moi et pour présenter tous ces artistes que je rencontrais.
Ça a été difficile de fidéliser un public ?
Il a vite adhéré, séduit par l’effet de nouveauté. Au début, c’était surtout mal vu dans les administrations, à la Direction régionale des affaires culturelles où on me disait que ce n’était pas de la culture. Heureusement, nous avons fait nos preuves et nous ne sommes plus au temps où je devais appeler les DNA pour leur soumettre de créer une rubrique “humour” car ils ne savaient pas où nous caser…
Comment définir le Kafteur ? Écolo, bricolo, familial…
Bricolo, c’est certain, vu que nous continuons à tout faire de nos petites mains : nous n’avons pas d’aides financières (sauf pour nos créations) pour faire exister le lieu. Familiale, dans la mesure où nous fonctionnons grâce à un noyau de bénévoles qui s’impliquent à la caisse, au bar… Écolo aussi, même si notre indice carbone n’est pas si faible que ça ! Par contre, nous essayons, dans notre programmation, d’aborder des thématiques citoyennes.
Quel type d’humour défendez-vous ?
Nous défendons des formes, non formatées, éloignées de celles présentes à la télé, sur Rire & Chansons ou du stand-up avec des vannes toutes les dix secondes. J’aime les artistes qui ont un univers à eux : le duo Dau et Catella, Fabien Kachef, capable de faire un spectacle sans paroles, ou le comédien campant le rôle de Maria Bodin, acariâtre de 80 balais qui débarque sur scène avec son solex et ses histoires de lapins.
Et Bigard ?
L’an passé, il nous a sollicité pour “roder” son spectacle. Comme François Rollin l’avait écrit et que je voulais faire “un coup”, nous lui avons loué la salle. Je dois avouer que ça n’est vraiment pas ma tasse de thé…
Comment envisagez-vous les vingt prochaines années ?
Nous aimerions relocaliser le Kafteur dans un espace plus adapté : le bar en face de La Laiterie qui appartient à la Ville. Il s’agirait d’en faire un lieu de vie ouvert sur les autres structures environnantes, un outil performant pour accueillir des spectacles, proposer des ateliers ou des résidences. J’ai l’impression d’avoir fait le tour du Kafteur actuel…
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