Famille sonore
Le directeur du Taps Olivier Chapelet explore le monde tchékhovien avec Oncle Vania, nouvelle création à la fois rieuse et grave.
Initialement intitulée L’Homme des bois, cette œuvre de jeunesse traitant d’écologie et de respect de la nature a été désavouée en étant retirée après quelques représentations, puis remaniée par Tchékhov. Le metteur en scène précise que l’on « devine que la pièce est en quelque sorte l’histoire de Sonia, nièce d’Ivan, la seule à l’appeler Oncle Vania ». Cette jeune fille boiteuse et décrite comme laide tente de positiver face à une famille divisée en deux camps : les égoïstes versus les sacrifiés. Entre amours à sens unique, oisiveté bourgeoise et difficultés d’adaptation à la vie campagnarde, l’alcool, le travail et la croyance en un au-delà se substituent au bonheur. La situation a été rendue plus dramatique suite au décès de la regrettée sœur de Vania et mère de Sonia. Souvent évoquée, elle est symbolisée par un piano plus présent que dans l’œuvre, tel un fil conducteur. C’est ce qu’explique Sonia avec le prologue écrit par Olivier Chapelet, grâce auquel elle plante également le décor. Ce trait musical, renforcé par la guitare jouée par Téléguine, est consolidé par l’ajout d’un paysage sonore nocturne de pluie, grillons… qui amène une atmosphère « fédératrice et évasive ». Le texte, « modernisé pour obtenir une langue vive et parlée », est le résultat d’un travail réalisé par le metteur en scène sur les différentes traductions déjà existantes. Il a subi quelques modifications : monologues brisant le quatrième mur, références datées supprimées et retrait de la mère assez subalterne de Vania, dont les rares répliques sont redistribuées.
Le directeur du Taps depuis plus de dix ans aime citer Thomas Ostermeier duquel il s’inspire pour diriger sa compagnie OC&CO et « faire des découvertes avec d’autres esprits créatifs ». Les comédiens montrent ainsi différentes facettes de leurs personnages qui font appel à des palettes multiples de jeu. L’ambiance est partagée entre émotion et espoir, créant rires et larmes, et les réactions parfois clownesques de Vania forcent le trait comique de cette tragédie. La scénographie est volontairement vieillie avec une table, quelques chaises, un sol abimé et des pans de mur recouverts d’un papier peint usé; ce qui n’entache cependant pas la volonté d’Olivier Chapelet de démontrer que les thématiques tchékhoviennes sont parfaitement transposables à l’époque actuelle. À chaque changement d’acte des panneaux de plus en plus imposants émergent du sol, comme si l’espace subissait lui aussi l’explosion progressive et la réduction du champ des possibles.
À paraître chez Vibration (16 €)
vibration-editions.com
Au Taps Scala (Strasbourg), du 5 au 15 novembre
taps.strasbourg.eu
Au Théâtre du Pilier (Giromagny), dimanche 24 novembre
theatredupilier.com
À l’Espace Grun (Cernay), jeudi 12 décembre
ectc.fr
Au Mac (Bischwiller), jeudi 19 décembre
mac-bischwiller.fr
À l’Espace Rohan (Saverne), jeudi 23 janvier 2020
espace-rohan.org
À la Saline (Soultz-sous-forêt), vendredi 31 janvier 2020
la-saline.fr
À La Méridienne (Lunéville), vendredi 7 février 2020
lameridienne-luneville.fr
Au Diapason (Vendenheim), mardi 24 mars 2020
vendenheim.fr