Les éternels

Croquis de costume de Dominique Louis

L’Opéra-Théâtre de Metz Métropole accueille la création mondiale de Nous Sommes éternels de Pierre Bartholomée. Dans son troisième opéra, le compositeur belge met en musique un foisonnant roman de Pierrette Fleutiaux.

Paru en 1990 chez Gallimard, Nous Sommes éternels obtint cette année là le Prix Femina : roman de quelque 900 pages, il se voit métamorphosé en un opéra dont le livret est cosigné par son auteur, Pierrette Fleutiaux. Pour explorer les arcanes de l’existence d’Estelle, seule survivante de sa famille dont la quête consiste à comprendre, après la Libération, pourquoi son enfance a été un mensonge et la raison de l’anéantissement des siens, Pierre Bartholomée (né en 1937) livre une partition épousant « une intrigue se déployant sur plusieurs époques qui se télescopent ». Et le compositeur belge de rajouter : « Dans le roman même, il est tout le temps question d’opéra. Il y a une profonde logique à mettre cette histoire en musique. » Marqué en tant que chef « par la Deuxième École de Vienne – Berg, Schönberg, Webern – et l’avant-garde radicale des années 1950 », celui qui fut plus de vingt ans durant directeur artistique de l’Orchestre philharmonique de Liège écrit des pages pétries d’une grande élégance, évoquant souvent celles de Stravinsky où se trouvent des échos ravéliens – manifestes ici – ou debussystes. « Je transcris la musique qui sort du texte. L’histoire éveille des émotions en moi, qui se traduisent en sons. J’espère que ma partition est aussi fluide que le sang qui circule dans les veines de ce roman », dans lequel les jeux de la mémoire sont permanents entre les personnages et où la tension est palpable. Elle s’illustre dans une mise en scène millimétrée de l’ancien directeur du Théâtre du Peuple de Bussang, Vincent Goethals, et par un décor signé Anne Guilleray évoquant une vaste demeure bourgeoise vaguement inquiétante qu’on croirait sortie d’une toile de Magritte ou Delvaux. Pierre Bartholomée poursuit : « À l’opéra, je crois que la musique est en charge du non-dit. Les paroles expriment, le plateau montre, mais la musique doit pouvoir mettre en convergence un certain nombre de choses : le souvenir, le pressentiment, le merveilleux, la ferveur, mais aussi le mystère, car un pacte secret est au coeur de cette intrigue où il est question de mort, d’amours, d’éternité, de guerre et d’enfance. Pour l’exprimer j’ai imaginé une musique ductile, versatile, capable de changements très rapides de colorations de vitesse, d’affect. »


À l’Opéra-Théâtre de Metz Métropole, du 16 au 20 novembre

opera.metzmetropole.fr

pierrebartholomee.com

Répétition publique samedi 10 novembre (14h). Entrée libre sans réservation (nombre de places limité)

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